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Par Marc81 le 27 Novembre 2011 à 11:27
Doit-on dire en Avignon ou à Avignon ?
Le site de la municipalité de ladite ville est catégorique :
« La formule en Avignon, si elle permet d'éviter un hiatus quelque peu dissonant, est toutefois incorrecte lorsqu'elle s'applique à la ville contenue dans ses limites communales. Son emploi dans ce cas est souvent le fait de l'ignorance ou d'un certain pédantisme basé parfois sur des nostalgies d'Ancien Régime. »
En Avignon est, en effet, une formulation archaïque, que certains ont voulu justifier par le glorieux passé de ce territoire ayant constitué au XIVe siècle un État à part entière appartenant au Saint-Siège. S'il était justifié, à cette époque, de se rendre en Avignon (comme on se rend aujourd'hui en Provence ou en Europe), on dira de nos jours à Avignon, comme pour toute ville de France (à Albi, à Aix, à Agen...).
De même, les beaux esprits qui disent en Arles sous le prétexte qu'Arles fut royaume au IXe siècle feraient mieux de s'abstenir... à moins d'être provençaux de cœur et de langue (en provençal, on peut demeurer en Avignoun, en Arle et en Antibo !).
En résumé
Devant un nom de ville, la préposition provençale en ne saurait se substituer par pédantisme à la préposition française à dans la langue soignée.
Aller, demeurer à Avignon, à Arles.
Remarque 1 : Toujours selon le site de la ville d'Avignon, « l'usage a voulu que l'on tolère de nos jours encore les expressions "en Arles" ou "en Avignon" pour désigner la région autour de la ville, le "pays" formé par les environs, sans limites administratives bien établies ».Remarque 2 : Selon l'Académie, pour une fois bien conciliante, « on ne saurait condamner les tournures en Arles, en Avignon, bien attestées chez les meilleurs auteurs, et qui s'expliquent à la fois comme archaïsme (l'usage de en au lieu de à devant les noms de villes, surtout commençant par une voyelle, était beaucoup plus répandu à l'époque classique) et comme régionalisme provençal. Il semble cependant que cet emploi de en soit en régression. Rien ne justifie qu'on l'applique à d’autres villes : on ne dira pas en Arras, en Amiens, etc. »
Remarque 3 : Dans le même registre, on veillera à dire : J'habite Paris ou à Paris. Je travaille à Paris (et non sur Paris, comme on l'entend trop souvent sous prétexte de vouloir signifier bien improprement « dans la région parisienne »). À la rigueur pourra-t-on accepter l'emploi de sur après un verbe de mouvement (Il déménage sur Paris), même si la préposition à reste de meilleure langue. L'Académie est cette fois catégorique : « La préposition sur ne peut traduire qu'une idée de position, de supériorité, de domination, et ne doit en aucun cas être employée à la place de à ou de en pour introduire un complément de lieu désignant une région, une ville et, plus généralement, le lieu où l'on se rend, où l'on se trouve. »
À ce sujet, voici ce qu'écrivait en 2002 Maurice Druon, secrétaire perpétuel honoraire de l'Académie française :
« “Je vais descendre sur Marseille.” Vous trouvez-vous donc en hélicoptère ? [...] Cette pauvre préposition sur est harassée. On la met à toutes les sauces. Elle nous vient après plusieurs avatars du latin super, supra. On l'a chargée au fil du temps de bien des sens, propres ou figurés, matériels ou abstraits. Mais pourquoi lui impose-t-on, de surcroît, d'exprimer des indications qui ne comportent nulle notion de position, de supériorité ou de domination ? Il y a là un abus qui devient un tic. Soyons sur nos gardes pour n'y pas céder. »
Le Palais des Papes à Avignon.
(photo Wikipédia sous licence GFDL by Jean-Marc Rosier de http://www.rosier.pro)
14 commentaires -
Par Marc81 le 23 Novembre 2011 à 09:13
De sens concret et abstrait, la locution prépositive à l'encontre de signifie « à l'opposé de, en opposition à » (selon l'Académie) et aussi « au contraire de » (selon Larousse), « contrairement à » (selon le TLFi). Elle s'emploie surtout avec des verbes de mouvement (aller, venir) ou d'action (agir, prendre une décision), pour exprimer les idées de rencontre et d'affrontement.
[Des bandes] s'avançaient à l'encontre de nous, aux cris de "Vive la République !" (Anatole France).
Le bandit s'était hâté de venir à l'encontre de l'assaillant (Maurice Leblanc).
Cela va à l'encontre de mes principes, du règlement [= cela est contraire à...].
Cette décision a été prise à l'encontre de l'opinion générale.
Il a agi à l'encontre de nos recommandations.
À l'encontre de ce que vous prétendez, j'affirme que...
À l'encontre de mon interlocuteur, je pense que...
Voilà pour la théorie. Dans la pratique, observent Grevisse et Hanse, la locution se prend couramment (et de longue date) au sens plus large de « contre » : « Dieu estoit offensé et irrité à l'encontre d'eux » (Jean Calvin, avant 1564), « Les soldats [...] ayans conceu quelque despit et quelque haine à l'encontre de luy » (Jacques Amyot, 1565), « Si quelqu'un vouloit ergotiser à l'encontre de ce remede » (David de Planis Campy, 1623), « [La préposition encontre] n'est plus d'usage que dans les actes de Justice ou d'Eglise. Elle signifie contre. Ils ont leur recours à l'encontre de lui » (Dictionnaire de Richelet, édition de 1706), « Les boissons qu'elle composait à l'encontre de la fièvre » (Sand, 1849), « [Une] machination à l'encontre de la jeune comédienne » (Théophile Gautier, 1863), « Ses projets de vengeance à l'encontre d'un tiers » (Grand Larousse du XIXe siècle, 1873), « Les coalitions à leur encontre » (Paul Claudel, 1957), « Une manœuvre arbitraire à l'encontre de mon pays » (Charles de Gaulle, 1959), « [Des] reproches à l'encontre d'une œuvre » (Jacques Audiberti, 1965), « Les griefs conscients de Thésée à l'encontre d'Hippolyte sont nombreux » (Robert Georgin, 1975), « Je ne sais quelle prévention j'avais à son encontre [un roman] » (Jean Dutourd, 2002), « Sékou Touré prononce à l'encontre de la France un véhément réquisitoire » (Simone Veil, 2010). Rien que de très logique, au demeurant, quand on songe que l'ancienne préposition encontre, à l'origine de notre substantif (attesté au sens de « ce qui arrive fortuitement, soit en bien, soit en mal », d'où « rencontre, aventure, occasion » et aussi « combat, opposition ») − à moins que ce ne soit l'inverse (1) −, n'était autre qu'un doublet de contre dont elle renforçait le sens (à l'instar du bas latin incontra, renforcement de contra par le préfixe -in) (2).
Prise à contre-pied, l'Académie choisit de réserver ses coups à l'emploi − tenu pour fautif − de à l'encontre de pour à l'égard de, à l'endroit de, envers (3) :
« On dit :
Il a des torts envers vous (et non Il a des torts à votre encontre),
Se montrer sévère à l'égard de, à l'endroit de, envers... (et non à l'encontre de...),
Une menace, une accusation à l'endroit de, envers... (et non à l'encontre de...),
La violence à l'endroit des femmes, envers les femmes (et non à l'encontre des femmes) » (rubrique Dire, ne pas dire du site Internet de l'Académie, 2012).Le dictionnaire Orthodidacte lui emboîte le pas, tout en apportant une précision :
« La locution à l'encontre de est parfois mal employée, en lui attribuant le sens de "envers, à l'égard de". On dit par exemple la violence envers les animaux, plutôt que la violence à l'encontre des animaux, car il n'y a pas là d'opposition, de confrontation entre deux parties. »
Las ! les contre-exemples, là encore, ne manquent pas : « Je vueil qu'il muire ; il l'a desservy à l'encontre de moy [= "à mon égard", selon le Dictionnaire du moyen français] » (Froissart, avant 1400), « Quand nous usons d'outrage et de violence à l'encontre de nos prochains » (Jean Calvin, avant 1564), « Usant de grandes menaces à l'encontre desdits fideles » (Jean Crespin, 1570), « Sa facilité aux souspeçons et accusations à l'encontre des gents de bien » (Montaigne, 1580), « Marius s'estant montré si cruel à l'encontre des partisans de Sylla » (Nicolas Coffeteau, 1623), « Elle fut cependant honnête à son encontre » (Sand, 1848), « La générosité à l'encontre des gredins [= "envers les gredins", selon le TLFi] est presque une indélicatesse à l'encontre du bien » (Flaubert, 1853) (4), « Le mot si sévère de Claudel à l'encontre des surréalistes » (Frédéric Vitoux, 2014)... jusque dans les colonnes du TLFi : « Exercer des violences à l'encontre de quelqu'un » (à l'article « violenter ») et du propre Dictionnaire de l'Académie : « Être porté aux attouchements grossiers à l'encontre des femmes » (à l'article « empoigne »). On pourrait encore citer cette remarque de Jean-Paul Jauneau : « S'agissant d'une personne, il me semble plus correct d'employer à l'encontre de que envers après tout autre verbe [que aller et agir], lorsque l'action est préjudiciable à la personne concernée : Ils ont fait preuve d'une excessive sévérité à l'encontre du prévenu » (N'écris pas comme tu chattes, 2011). Qui croire ?
En l'absence de consensus, on veillera à tout le moins, et en dépit des exemples de Sand et de Flaubert, à réserver à l'encontre de à un contexte défavorable.Autre point de désaccord entre nos spécialistes : la locution peut-elle s'utiliser avec un adjectif possessif, comme c'est souvent le cas dans la langue du droit et dans le style administratif ? Non, répondent en chœur Thomas et Girodet (« Ne pas dire à mon encontre, à ton encontre, à son encontre... »), sans toutefois justifier leur position (5). D'autres sont moins catégoriques : « Je crois qu'il faut toujours dire à l'encontre de... sans apercevoir, je le confesse, la raison qui interdit d'accoler à encontre un possessif » (Abel Hermant, 1937), « L'exclusion du possessif dans cette expression n'est guère justifiable, [mais] on s'y conformera » (Dupré, 1972), « La construction avec un adjectif possessif, bien que fréquente aujourd'hui dans le registre courant, est à éviter dans l'expression soignée, en particulier à l'écrit » (Larousse en ligne). D'autres encore n'y trouvent rien à redire, bien au contraire : « Je n'ai rien à son encontre (= contre lui) » (Le Bescherelle pratique, 2006), « Au lieu de dire à l'encontre de moi, de toi..., on remplace le pronom personnel par un adjectif possessif, ce qui donne à mon encontre, à ton encontre... » (Jauneau, 2011), « Avec certaines formes, comme à l'insu, à l'encontre, de la part, par l'intermédiaire, l'article et le complément en de peuvent être remplacés par un déterminant possessif » (La Grande Grammaire du français, 2021). Goosse, enfin, se contente d'observer, citations à l'appui (Sand, les Goncourt, Claudel, De Gaulle, Dutourd, Druon, excusez du peu), que à mon (ton...) encontre est moins rare que ne le disent Hanse et le TLFi.
Dans le doute, mieux vaut encore écrire :
Il a proféré des menaces contre moi (plutôt que à mon encontre).
(1) Les spécialistes ne s'accordent pas sur ce point : « Encontre a été d'abord et est resté longtemps un substantif féminin » (Littré), mais « La préposition encontre devint hors d'usage au début du XVIIe siècle, contre remplissant ses emplois. Mais le substantif auquel elle avait donné lieu persista dans la locution à l'encontre de, attestée dès le XIIIe siècle » (Agnès Baril, 2004). Quant au Dictionnaire historique de la langue française, il atteste le substantif encontre (« déverbal de encontrer "trouver quelqu'un sur son chemin", verbe éliminé par rencontrer ») vers 1165, soit bien après l'apparition de la préposition (Xe siècle, sous la forme encontra ; milieu du XIIe siècle, sous la forme moderne).
(2) « Forme extensible de contre, [encontre] en partage les significations » (La Curne de Sainte-Palaye, 1882), « Cette préposition [encontre] a le même sens que la préposition simple contre, et par conséquent n'avait guère de raison d'exister » (Edmond Huguet, 1894), « [En ancien français] contre exprime l'idée de en face de [et de en direction de] autant que l'opposition. Le composé encontre a les mêmes sens » (Eugène Étienne, 1895), « S'il s'agit d'[exprimer] un rapport adversatif au sens abstrait, l'auteur [Froissart] emploie contre, encontre, à l'encontre de sans distinction de sens » (Frans Bekkers, 1931).
(3) Allez savoir pourquoi, contre complète la liste dans l'édition papier parue chez Philippe Rey en 2020 : « On ne confondra pas [la locution à l'encontre de] avec à l'égard de, à l'endroit de, contre ou envers. »
(4) Plus étonnant encore : « Il avait des remords à l'encontre du jardin [ayant négligé de l'entretenir] » (Bouvard et Pécuchet). Pour Albert Cim, « [Flaubert] donne à la locution prépositive à l'encontre de [...] le sens, qu'elle n'a jamais eu, de relativement à, à propos de. »
(5) L'explication se laisse entrevoir : contrairement à égard et à endroit, le substantif encontre est tombé en désuétude depuis des lustres. D'aucuns, rechignant (à tort ou à raison) à lui redonner vie en écrivant à son encontre, préfèrent s'en tenir à la forme grammaticalisée à l'encontre de (lui, elle), où encontre n'est plus analysable pour le sentiment linguistique d'aujourd'hui.
Remarque 1 : Il est amusant de noter que la locution à l'encontre de, d'emploi soutenu en français moderne, fut dénoncée par Vaugelas (1647) comme ne se disant jamais à la cour et ne se rencontrant pas sous la plume des bons auteurs : « A l'encontre de quelqu'un pour dire contre quelqu'un est un terme dont une infinité de gents usent en parlant et en escrivant, qui neantmoins est tres mauvais et comme barbare [...]. De quelque façon qu'on s'en serve, il ne vaut rien du tout. » Même condamnation chez Ampère (1841), dans un saisissant raccourci : « Contre est le mot simple, qui aurait dû suffire, mais on y a joint au moyen-âge [sic] la préposition en, et par là contre a été inutilement allongé en encontre. Puis, au XVIe siècle, on imagina de remplacer encontre par l'expression bien plus traînante encore de à l'encontre de. »Remarque 2 : À l'encontre s'emploie aussi absolument (sans de) dans la langue littéraire : Cela est juste, personne ne va à l'encontre (sous-entendu de cela) − comprenez personne ne s'y oppose.
Remarque 3 : Rappelons ici que à l'endroit de, à l'égard de et envers sont trois formules neutres (synonymes de quant à, vis-à-vis de), qui, de fait, peuvent s'employer dans un contexte favorable ou défavorable.
Il a fait preuve, à votre endroit (ou à votre égard), d'une grande bienveillance.
Il s'est montré incorrect à l'égard de ses amis.
La loi est sévère à l'endroit des criminels.
Être bien disposé envers quelqu'un. Éprouver de l'aversion envers quelqu'un.
Remarque 4 : Voir également le billet À l'instar de.
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Par Marc81 le 6 Novembre 2011 à 14:26
Appliqué aux choses, le nom féminin capacité désigne la contenance (la capacité pulmonaire, la capacité d'un hôtel) ainsi que différentes grandeurs caractéristiques (en électricité, en thermodynamique et en informatique, notamment).
En parlant d'une personne, il prend le sens d'« aptitude, faculté de comprendre, compétence » et se construit avec la préposition de − sur le modèle de (être) capable de −, devant un nom ou un infinitif.
Il a une grande capacité de travail.
Tout enfant a la capacité de surmonter les épreuves.
Pourtant, la préposition à est fréquemment employée à la place de de devant un infinitif, comme l'illustre cet exemple fourni par l'Académie (qui nous a habitués à plus de conservatisme) :
Je doute beaucoup de sa capacité à tenir cet emploi.
Il semble en effet que l'usage moderne préfère de quand capacité est précédé de l'article défini la et à quand capacité est précédé de l'article indéfini une ou d'un possessif (ma, ta, sa, leur...).
Comparez :
Ils ont trouvé la capacité de rebondir.
J'aimerais améliorer ma capacité à écouter (ou d'écouter).
Il a une bonne capacité à prendre du recul (ou de prendre du recul).
Elle doute de leur capacité à maîtriser la langue anglaise (ou de maîtriser).
La construction avec de n'en reste pas moins, à mon goût, de meilleure langue, même en cas de répétition de la préposition : La capacité de l'être humain de surmonter les épreuves (que l'on peut, en l'occurrence, avantageusement transformer en : L'aptitude de l'être humain à surmonter les épreuves).
Remarque 1 : De même écrira-t-on, avec l'antonyme incapacité : être dans l'incapacité d'agir, l'incapacité de contracter, mais une incapacité à faire quelque chose, l'incapacité de quelqu'un (ou son incapacité) à faire quelque chose.Remarque 2 : Capacité se construit également avec pour (lorsqu'il s'agit de personnes) dans l'expression juridique avoir capacité pour ou quand capacité est employé avec un article partitif (de la).
L'expérience lui avait donné de la capacité pour la guerre (Hamilton).
Remarque 3 : On dira correctement : Avoir la capacité d'agir ou Être capable d'agir, en mesure d'agir (voir le billet Être en capacité de).
Remarque 4 : On se gardera de confondre capable et susceptible (voir le billet Capable).
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Par Marc81 le 28 Octobre 2011 à 09:46
Le verbe devoir (du latin debere, tenir quelque chose de quelqu'un, lui en être redevable) fait partie de ces verbes qui revêtent différentes significations selon leurs constructions.
Devoir suivi d'un nom complément d'objet direct
Suivi d'un nom, devoir a le sens de « avoir à rembourser une somme d'argent », « être redevable à », « être obligé envers ».
Il me doit 15 euros.
Je lui dois la vie. Le pays doit sa prospérité au tourisme.
Les enfants doivent le respect aux parents.
Devoir suivi d'un verbe à l'infinitif
Suivi d'un infinitif, devoir sert à exprimer l'obligation (morale ou sociale), la contrainte, l'intention, le souhait, la probabilité, le caractère inéluctable ou le futur proche.Tu dois obéir (obligation).
Il a dû retourner précipitamment au bureau (contrainte, nécessité).
Nous devons nous voir demain (intention, projet).
Vous devriez passer à la maison (souhait, suggestion au conditionnel).
Ils ont déjà dû arriver chez eux (probabilité, supposition).
Cela devait arriver (caractère inéluctable).
Le train doit partir dans un instant (futur proche).
Se devoir (à, de)
Employé à la forme pronominale, le verbe devoir peut susciter quelques interrogations : doit-on dire Je me dois de faire cela ou Je me dois à faire cela ? Se devoir de est-il synonyme de devoir ?Se devoir à est suivi d'un nom et exprime l'obligation : Il se doit à sa famille (= il est dans l'obligation de se consacrer à sa famille).
Se devoir de est suivi d'un infinitif et exprime la nécessité morale : Il se doit de dire la vérité à sa famille. Elle se doit de réussir (= elle a le devoir de réussir).
On notera que, dans ces deux constructions, le sujet doit désigner une personne. Ainsi ne dira-t-on pas Cette question se doit d'être posée mais mérite d'être posée ou doit être posée.
Finalement, la différence entre se devoir de et devoir (par exemple, Je dois intervenir et Je me dois d'intervenir) est subtile. Dans les deux cas, il s'agit bien d'une obligation, d'une nécessité, mais sans doute exprimée avec plus de force et avec une connotation morale plus marquée dans la construction pronominale (Je me dois d'intervenir = je suis moralement tenu d'intervenir).
Remarque 1 : Le participe passé du verbe devoir ne prend un accent circonflexe qu'au masculin singulier, la confusion avec l'article du n'étant possible que dans ce cas.Il a dû intervenir mais Les intérêts dus. En bonne et due forme (= dans le respect des règles).
Remarque 2 : Attention à l'accord du participe passé : suivi d'un infinitif, dû reste invariable.
Les sommes que j'ai dû payer (les factures est COD de payer, pas de dû) mais Les sommes que j'ai payées ou Les sommes que j'ai dues.
Remarque 3 : Le tour impersonnel comme il se doit signifie « comme il est convenable de faire, comme c'est l'usage » ou, ironiquement, « comme on pouvait le prévoir ».
Ils ont fêté son anniversaire comme il se doit.
Remarque 4 : On notera l'ambiguïté de la phrase Il a dû partir, qui peut exprimer l'obligation (il a été obligé de partir) ou la probabilité (il doit déjà être parti).
Remarque 5 : Dans le registre soutenu, on emploie l'imparfait du subjonctif (ou le conditionnel présent) dans les formules dussé-je (ou dussè-je, selon les Rectifications orthographiques de 1990), dût-il, dussent-ils, devraient-ils, etc. (avec inversion du sujet).
Je finirai ces travaux, dussé-je y laisser la santé ! (= même si je devais y laisser la santé).
Remarque 6 : Comme le verbe pouvoir, devoir n'a pas d'impératif.
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Par Marc81 le 27 Octobre 2011 à 08:35
Dans le sens d'« être lent à venir, à se produire », le verbe tarder se construit le plus souvent avec la préposition à (+ infinitif).
Les secours ont tardé à arriver.
Je ne vais pas tarder à partir (= je suis sur le point de partir).
Avec la construction impersonnelle il (me) tarde, qui signifie « je suis impatient, j'ai hâte », on emploie de (+ infinitif) ou que (+ subjonctif).
Il me tarde de partir en vacances.
Il nous tarde que vous la rencontriez.
Le temps lui tarde de venir, que tout soit terminé (= Il lui tarde...).
Remarque : Tarder, verbe transitif indirect quand il se construit avec les prépositions à ou de, est également un verbe intransitif (c'est-à-dire n'admettant pas de complément d'objet).Les secours ont tardé. La police est venue sans tarder.
(Livre de Moritz Petz et Quentin Gréban, Editions Nord-Sud)
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