• « Décrochée de son câble de sécurité, elle n'a pas survécu à une chute de quinze mètres de haut pendant le final du spectacle (...) Une voix dans les hauts-parleurs a invité les spectateurs à quitter la salle » (à propos d'une acrobate de la troupe du Cirque du Soleil).

    (Maxime Pargaud, sur lefigaro.fr, le 1er juillet 2013) 

     

    FlècheCe que j'en pense


    Les considérations orthographiques ci-après évoquées sont, faut-il le préciser, sans commune mesure avec le drame qui s'est joué à Las Vegas. Il n'empêche : un e final à finale serait de meilleure langue, selon l'Académie, lorsque ledit substantif masculin est employé au sens de « dernière partie d'une œuvre » (en l'espèce, d'un spectacle). Le débat n'est pas récent, tant s'en faut, entre partisans de la graphie finale, respectueuse de l'étymologie italienne (il s'agit à l'origine d'un terme de musique emprunté de l'italien finale) et partisans de la graphie francisée (présentant l'avantage de limiter les risques de confusion avec le substantif féminin finale, dernier élément d'une série, d'une compétition). Si les deux formes sont aujourd'hui admises, on est fondé à se demander s'il viendrait à l'idée de qui que ce soit de parler d'un « doucement » à propos d'un... piano.

    Quant à haut-parleur, qu'on l'écrive avec un trait d'union (graphie traditionnelle) ou sans (graphie réformée), seul le second élément qui le compose prend la marque du pluriel : des haut-parleurs (ou des hautparleurs), haut ayant ici valeur d'adverbe (n'est-il pas question d'un appareil permettant de parler haut ?). Encore faut-il que le beau parleur se garde de toute liaison abusive (des zhaut-parleurs), sous peine de tomber encore plus bas.


    Voir également le billet Au final.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Pendant le finale du spectacle.

    Une voix dans les haut-parleurs.

     


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  • « Les nouvelles lignes directrices de l'OMS s'appuient sur des données scientifiques récentes montrant que soigner plus précocément les malades permet de freiner plus vite le développement du virus dans le sang » (à propos du sida).

    (paru sur lefigaro.fr, le 1er juillet 2013) 

     

     

    FlècheCe que j'en pense


    On le sait, la plupart des adverbes ont été formés à l'origine en ajoutant au féminin de l'adjectif correspondant le suffixe -ment (souvenir du substantif féminin mens, « esprit, manière » en latin) : fier → fière → fièrement, vif → vive → vivement, etc.

    L'adjectif précoce, dont les formes féminine et masculine sont identiques, a donc logiquement donné naissance à l'adverbe précocement. D'où vient alors l'hésitation si fréquente avec la forme (fautive) doublement accentuée précocément ? De ce que l'e final de certains adjectifs s'est changé en é lors de la formation de l'adverbe : ainsi de énorme / énormément, intense / intensément, etc. Féraud, dans son Dictionnaire critique de la langue française (1787), dénonçait déjà ces irrégularités : « Richelet écrit énormement, et il semble que la raison dicte cette manière d'écrire, cet adverbe étant formé d'énorme, dont l'e final est muet, mais l'usage a prévalu d'écrire énormément [...] et c'est une exception à la règle de la formation des adverbes. »

    De même, l'e caractéristique de la forme féminine de l'adjectif a le plus souvent disparu quand il était précédé d'une voyelle : éperdu → éperdue → éperduement (graphie maintenue chez certains auteurs actuels) et éperdument (graphie officielle). Dans d'autres cas, ledit e a tout aussi arbitrairement laissé place à un accent circonflexe sur la voyelle précédente : assidu → assidue → assiduement (et ses variantes assidueument, assidueusement), assidument et assidûment (graphie traditionnelle, attestée depuis le XVIIe siècle). Cette fois, c'est Littré qui s'insurge, à bon droit : « On remarquera l'accent circonflexe que met l'Académie, tandis qu'elle n'en met ni à absolument, ni à ambigument, etc. Il vaudrait mieux qu'elle suivît un système, et mît partout l'accent circonflexe ou le supprimât partout. » Notre spécialiste semble avoir été entendu, puisque les réformateurs de 1990 préconisent l'abandon du circonflexe sur le u (et sur le i) quand il ne se justifie pas. Il ne reste plus qu'à attendre patiemment que la graphie réformée assidument soit enregistrée par une Académie dont on ne sait plus si elle freine vite ou si elle accélère lentement.


    Remarque : Les mêmes observations valent pour l'adverbe atrocement, que l'on trouve plus souvent qu'à son tour orthographié avec un accent aigu qui ne se justifie point : « La marée était pleinement haute, soleil riant atrocément » (Jean-Marie Turpin). En revanche, on écrira correctement forcément, régulièrement formé à partir du participe passé adjectivé forcé.


    Voir également le billet Accent circonflexe.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Soigner plus précocement les malades.

     


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  • Le niveau n'en finit plus de chuter« Lou, candidate cette année, explique s'être sentie piégé. Comme la majorité des collégiens français, elle n'avait même pas aborder l'un des sujets avant la fin des cours (...) Les enseignants n'ont "pas le temps d'apprendre (les élèves) à réfléchir" » (à propos de l'épreuve d'histoire-géographie-éducation civique du brevet des collèges 2013).

    (Laura Damase, sur franceinfo.fr, le 2 juillet 2013) 

     

    FlècheCe que j'en pense


    Où l'on soupçonne le français de ne plus être la langue officielle sur France Info.

    Comment oser imaginer que nos pauvres collégiens puissent être en mesure de disserter sur la guerre de Corée ou sur la crise de Cuba quand leurs aînés éprouvent encore des difficultés à accorder un adjectif ou à faire la différence entre un infinitif et un participe passé...

    À quand une épreuve de relecture au sein des rédactions de France ?

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Elle s'est sentie piégée.

    Elle n'avait même pas abordé le sujet.

    Les enseignants n'ont pas le temps d'apprendre aux élèves à réfléchir.

     


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  • A l'annoncé


    « A l'annoncé de la peine, Matthieu est resté impassible et froid comme il l'a été durant tout le procès » (à propos de l'assassin d'Agnès Marin).

    (Isabelle Monnin, sur nouvelobs.com, le 28 juin 2013) 

     





    FlècheCe que j'en pense


    Annonçons d'emblée la couleur : notre journaliste s'est rendue coupable de télescopage entre les paronymes annonce et énoncé. Nul besoin de tambours et de trompettes pour confirmer que l'action d'annoncer se dit annonce en bon français – le participe passé annoncé, à la différence d'accusé, ne bénéficiant pas jusqu'à preuve du contraire de circonstances « substantivantes ».


    Voir également le billet Déroulé / Déroulement.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    À l'annonce de la peine.

     


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  • « Jean-Marc Ayrault aurait demandé à Delphine Batho de retirer ses propos. C'est quand elle a refusé de le faire qu'elle s'est vue limoger » (à propos de la désormais ex-ministre de l'Écologie, photo ci-contre).
    (paru sur lefigaro.fr, le 2 juillet 2013)

    (photo Wikipédia sous licence GFDL par David Monniaux)


    FlècheCe que j'en pense


    La règle est pourtant connue : l'accord du participe passé suivi d'un infinitif ne peut durablement se développer que si le complément d'objet direct du premier fait l'action exprimée par le second. Reprenons le cours de l'affaire : Delphine Batho a vu qui ? quelqu'un (en l'espèce, Jean-Marc Ayrault) la limoger ; se est complément d'objet direct de l'infinitif limoger (et non du participe passé vu). Rien que de très (éco)logique, me direz-vous, puisque l'on imagine mal la future ex-ministre se limogeant elle-même. Partant, l'accord du participe passé n'a pas lieu d'être, faute d'avoir été correctement budgété.

    Une autre construction était toutefois envisageable, avec se voir : elle s'est vue limogée. Dans ce cas (où l'infinitif s'est recyclé en participe passé), se est complément d'objet direct du verbe voir et le participe limogée, attribut dudit COD (elle a vu elle-même être limogée).

    Si les deux tours sont grammaticalement corrects, le premier a ici ma préférence, car il met davantage l'accent sur le déroulement de l'action que sur le résultat de celle-ci. En l'occurrence, on distingue nettement le Premier ministre faisant tomber le couperet, avant que Delphine, verte de rage, ne quitte... le bateau.


    Voir également le billet Accord du participe passé des verbes pronominaux.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Elle s'est vu limoger (ou Elle s'est vue limogée).

     


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