Peu de gens connaissent l'étymologie de l'adjectif formidable. Emprunté du latin formidabilis, « redoutable », lui-même dérivé de formido, « épouvantail, peur, effroi », formidable qualifiait à l'origine uniquement ce qui inspire une grande crainte.
Un séisme formidable. Un coup de tonnerre formidable. Une légende formidable.
Par la suite, le sens de notre adjectif s'est élargi à « qui sort de l'ordinaire par son intensité, sa puissance, sa taille ».
Un appétit formidable. Une volonté formidable. Un culot formidable.
À force de glissement sémantique, formidable est même devenu synonyme de remarquable, pour exprimer l'admiration, l'approbation, voire l'étonnement dans le langage familier − perdant, de ce fait, toute la saveur de son sens originel... jusqu'à venir signifier exactement son contraire !
Quelqu'un de formidable. Un livre formidable.
C'est formidable, ça ! Tu ne te souviens jamais de ce que je te dis.
Voilà comment, à force de détourner un mot de son sens premier, on peut en arriver à de fâcheux malentendus : ce « quelqu'un de formidable », doit-on comprendre qu'il inspire de l'admiration ou de la crainte ? Dans la langue soignée, afin d'éviter tout contresens, on gagnera donc à employer formidable dans ses deux premières acceptions et on recourra à remarquable, sensationnel, impressionnant... dans tous les autres cas dignes d'être remarqués.
Une époque qui inspire la crainte... ou une époque admirable ?
(Film de Gérard Jugnot)