C'est en entendant l'écrivain Frédéric Beigbeder, pourtant fin lettré, évoquer le « crash boursier » dans une émission de télévision que m'est venue l'idée de cet article. Car, enfin, les bourses mondiales ont beau piquer du nez en ce moment , nul ne les a encore vues rater leur atterrissage sur le tarmac !
Certes, les Anglais parlent de financial crash, mais on se gardera en français de commettre cet abus de langage en évitant toute confusion entre crash et krach (ainsi qu'entre leurs différents homophones).
Krach (débâcle boursière)
Krach (avec ch qui se prononce [k] et pluriel en s) est un mot d'origine allemande qui a d'abord signifié « craquement », puis s'est spécialisé dans la langue de la finance (sous l'influence de l'anglais crash), à la suite de l'effondrement des cours de la Bourse à Vienne, le 9 mai 1873. En français, le substantif désigne une débâcle boursière, caractérisée par un effondrement des cours ; par extension, il prend également le sens de « faillite, banqueroute, ruine ».
Crack (champion ou drogue)
Crack (pluriel en s) est un mot possédant une double origine : anglaise (« fameux », « d'élite »), quand il désigne un cheval de course aux qualités exceptionnelles ou une personne qui excelle dans sa spécialité ; anglo-américaine (« coup de fouet »), quand il désigne une drogue dérivée de la cocaïne.
Crac (onomatopée)
Crac est une onomatopée évoquant un bruit sec (le craquement d'une branche) ou la soudaineté.
Craque (mensonge)
Dérivé du verbe craquer au sens de « mentir », craque est un nom féminin que l'on trouve principalement dans l'expression populaire raconter des craques (= raconter des histoires mensongères pour se faire valoir).
Crash (aérien)
Quant à crash (avec sh qui se prononce [ch] et pluriel francisé en s), il s'agit d'un mot d'origine anglaise (non reconnu par l'Académie *) appartenant au vocabulaire aérien, qui signifie « atterrissage brutal, chute, écrasement » et dont le sens s'est étendu à « accident automobile » et à « plantage informatique ». On évitera de le confondre avec son homonyme crache, forme conjuguée du verbe français cracher. Raison de plus pour préférer au néologisme se crasher (et à sa variante se scratcher) les verbes s'écraser ou se fracasser.
Les krachs de Wall Street en 1929 et de la Bourse de Tokyo en 1989.
Les crashs d'avion (ou mieux : les accidents, les écrasements d'avion) se multiplient.
Il a survécu à un crash automobile (ou mieux : à un accident de la route) mais a perdu toute sa fortune dans le récent krach financier et immobilier.
Ce crack gagne toutes les courses hippiques.
En athlétisme, cet homme est un crack (NB : en ce sens, l'Académie recommande l'emploi de champion ou as).
La police l'a surpris en train de fumer du crack.
Et crac ! la branche s'est cassée.
* L'Académie française admet toutefois sur son site Internet qu'« il est possible d'employer crash aérien pour désigner un accident dans lequel un avion se fracasse contre quelque chose ».
Remarque 1 : En français, l'expression krach boursier relève du pléonasme, même si le nom krach voit aujourd'hui son sens s'étendre au-delà du seul marché financier (l'immobilier, notamment).
Remarque 2 : Emprunté de l'arabe karak (« château fort »), le nom masculin krak désigne une forteresse construite par les croisés en Palestine et en Syrie. Le krak des Chevaliers.
« Moi, j'ai un piège à fille un piège tabou / Un joujou extra qui fait crac boum hue »
(paroles de la chanson Les Play-boys)