• La prononciation ne permet pas toujours de déjouer les pièges de la langue de Molière. Ainsi, doit-on écrire la salle tout entière s'est mise à applaudir ou bien la salle toute entière s'est mise à applaudir ? En fait, tout est ici adverbe (au sens de « complètement, entièrement, tout à fait ») et reste donc invariable... enfin, pas toujours... Comme souvent en français, il y a des exceptions !

    Un petit rappel des différents emplois de tout et de ses règles d'accord s'impose.

    Flèche

    Tout, nom ou pronom


    Tout peut être nom ou pronom indéfini avec le sens de « toutes les choses ».

    C'est un tout (nom singulier). Ce sont des touts cohérents (nom pluriel).

    Tout est bien qui finit bien. Il a tout vu, tout entendu (pronom singulier).

    Tous pour un et un pour tous (pronom pluriel, prononcé tousse pour faire la distinction avec tous, adjectif pluriel).

    FlècheTout, adjectif


    Tout est adjectif (ou déterminant indéfini) quand il précède un autre déterminant, un nom ou un pronom. Il s'accorde alors en genre (masculin / féminin) et en nombre (singulier / pluriel).

    Tout homme est présumé innocent (= n'importe quel homme).

    C'est toute une histoire (= une véritable histoire).

    Il est parti toute la semaine (= la semaine entière).

    Tous nos amis sont réunis (adjectif pluriel, prononcé tou pour faire la distinction avec tous, pronom pluriel).

    Remarque : Voir également l'accord de tous avec gens.

    FlècheTout, adverbe

     
    Tout est adverbe devant un participe, un autre adverbe ou un adjectif, au sens de « complètement, entièrement, tout à fait ». Dans ce cas, il suit une règle d'accord un peu particulière.

    Rappel de la règle d'accord

    Tout, adverbe, est invariable sauf quand il est placé devant un adjectif féminin commençant par une consonne ou un h aspiré (pour raison d'euphonie).

     
    Ainsi un adverbe peut-il varier... (*)

    Elle est tout étonnée (et non toute étonnée) mais Elles sont toutes contentes. Ils sont tout contents.

    La salle tout entière s'est mise à applaudir (et non toute entière).

    Elles sont toutes honteuses (h aspiré) mais Elles sont tout heureuses (h muet).

    Les tout premiers instants mais Les toutes premières heures.

    Dans les tout prochains jours, dans les toutes prochaines semaines.

    Les tout-petits (= les petits enfants).

    Il lit tout en écoutant de la musique.

    Je le lui ai dit tout net. Ils sont tout juste sortis de table.

    Les plaisirs tout simples de la vie.

    Ils l'ont fait tout seuls mais Elle l'a fait toute seule.

    Remarque : Tout est également considéré comme adverbe devant un nom, dans certaines expressions figées (voir aussi Accord de tout dans les expressions).

    Elle est tout yeux tout oreilles (= très attentive).

    Elle est toute loyauté et toute franchise, tout feu tout flamme, tout ouïe.

    (*) Mais, précise Louis-Nicolas Bescherelle, « cet accord est purement euphonique, et tout n'en reste pas moins ce qu'il est : le fragment de l'[ancienne] expression adverbiale de tout point [= complètement, totalement] » (Grammaire nationale, 1834).

     Séparateur de texte

    Remarque 1 : On notera l'ambiguïté au féminin pluriel.

    Elles sont toutes contentes (= elles sont entièrement contentes → toutes adverbe  ; = toutes sont contentes → toutes pronom indéfini).

    Leurs filles sont toutes aussi grandes (les unes que les autres → toutes pronom indéfini) mais Leurs filles sont tout aussi grandes (que leurs garçons → tout adverbe, modifiant aussi).

    Remarque 2 : Dans l'expression tout autre, tout est adjectif et donc variable quand il signifie « n'importe quel », adverbe et invariable quand il signifie « tout à fait, entièrement ».

    Toute autre personne aurait compris (= toute personne autre, n'importe quelle autre personne → tout adjectif) mais Il fait tout autre chose (= il fait tout à fait autre chose → tout adverbe), un sujet d'une tout autre nature.

    NB 1 : Selon l'Office québécois de la langue française, « l'usage [moderne] veut qu'on emploie tout autre au singulier. Bien que les formes plurielles tous autres et toutes autres soient possibles, elles sont peu fréquentes. On les rencontre notamment dans la langue juridique. »

    NB 2 : Dans tous les cas, autre s'accorde avec le nom auquel il se rapporte.

    Nous aborderons de tout autres sujets (= des sujets entièrement différents → tout adverbe).

    Remarque 3 : Avec tout le monde et tout un chacun, l'accord se fait au masculin singulier.

    Tout le monde est là, tout un chacun le sait.

    Remarque 4 : Il convient de répéter l'adjectif tout lorsqu'il détermine des noms coordonnés de genre différent.

    Toutes les lois et tous les décrets.

    Remarque 5 : Voir également les expressions au tout début, les tout débuts.

     

    Subtilités : Tout suivi d'un complément prépositionnel (tout à, tout de, tout en) est parfois traité comme adverbe, plus souvent comme adjectif détaché.

    Elle est toute à ses pensées ou (plus logiquement) Elle est tout à ses pensées.
    Une femme toute de blanc vêtue ou (plus logiquement) Une femme tout de blanc vêtue.

    Là encore, on se gardera de l'équivoque avec un nom ou un pronom au féminin pluriel.

    Elles sont tout en noir (= entièrement en noir → adverbe, invariable) mais Elles sont toutes en noir (= toutes sans exception → pronom, accord).

    Tout entière
    Livre d'Olivier Ka, Éditions Milan

     


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