« Un jeune prodige de oud, ce soir, Aux heures d’été » (à l'occasion du festival des cultures d'ici et d'ailleurs, à Nantes).
(paru sur ouest-france.fr, le 8 août 2013)
(photo Wikipédia sous licence GFDL)
Ce que j'en pense
Pourquoi les règles de l'élision (devant un nom qui commence par une voyelle) ne s'appliqueraient-elles pas au substantif masculin oud (et à sa variante orthographique ud), instrument voisin du luth utilisé dans la musique arabe ? Parce qu'il s'agit d'un nom d'origine étrangère ? J'ai du mal à me faire à l'idée – pourquoi ne pas l'avouer ? – que l'on joue du oud sur les rives de l'oued...
« Les demi-voyelles sont traitées parfois comme des voyelles, parfois comme des consonnes, selon que le mot appartient au langage courant ou qu'il garde [une] saveur exotique », précise Jean Ehrhard dans ses Remarques sur trois difficultés de la prononciation française (1965). Il faut croire que le substantif oued, banalisé par notre passé colonialiste, ressortit au premier groupe (l'oued), quand le malheureux oud, moins pratiqué sous nos cieux, hésite encore à trouver sa voie. Et pourtant, ledit oud n'est-il pas emprunté de l'arabe al'ud (« le bois »), lui-même à l'origine du français luth (peut-être par l'intermédiaire du provençal lautz ou de l'espagnol alod, selon le Dictionnaire historique), preuve que la liaison s'est naturellement faite dans notre langue ?
À la réflexion, je pencherais également pour quelques considérations euphoniques : l'allitération en d dans un joueur d'oud peut heurter les oreilles délicates, mais assurément moins que dans cette phrase (âmes sensibles s'abstenir) : Il s’est engagé dans la cavalerie en tant qu'uhlan ; de fait, le u – ou l'u, c'est selon – du substantif masculin uhlan (« cavalier mercenaire ») est généralement aspiré.
En l'absence de caution 100 % pure ouate, on optera, selon le contexte et la finesse de son oreille, pour la liaison ou la disjonction.
Remarque 1 : Sur Wikipédia, l'article consacré audit instrument est assez symptomatique du flottement de l'usage : « l'oud » alterne avec « le oud » sous la plume du ou des auteur(s), le(s)quel(s) se refuse(nt) toutefois à l'élision avec le e de la préposition de (« plusieurs types de ouds », « nombre de oudistes »).
Remarque 2 : Les graphies 'oud, 'ud sont souvent privilégiées par ceux qui préconisent la disjonction : Le 'oud est un instrument à cordes pincées.
Remarque 3 : Les pluriels francisés sont ouds, oueds.
Remarque 4 : Rappelons, avec Grevisse, que l'élision n'a pas lieu devant oui, un (chiffre ou numéro), huit, huitaine, huitième, onze (sauf dans quelques expressions populaires), onzième…
Remarque 5 : Concernant ouate, l'usage ne semble pas davantage fixé : « Acheter de l'ouate ou de la ouate » (neuvième édition du Dictionnaire de l'Académie).
Ce qu'il conviendrait de dire
Un jeune prodige de oud ou d'oud ?