• « La reconduction, quasiment à l'identique, de ce gouvernement perclu d'échecs et d'impopularité était de mauvais augure » (à propos du gouvernement de Manuel Valls, photo ci-contre).
    (Alexis Brézet,  sur lefigaro.fr, le 8 avril 2014)  
     
    (photo Wikipédia sous licience GFDL par Jackolan1) 

     

    FlècheCe que j'en pense

    L'absence du s à perclus n'est pas, tant s'en faut, de meilleur présage. Car enfin, ne dit-on pas correctement au féminin : une personne âgée percluse de rhumatismes ?

    Certes, la tentation est grande, sous l'influence de la famille des participes en u (bu, pu, su, vu, etc.), d'écrire perclu(e) comme conclu(e), exclu(e). Il n'empêche : ces variantes populaires, quand elles auraient la caution de quelques bons auteurs (*), contreviennent à nos références orthographiques. Après tout, le s final de notre adjectif, qui ne se prononce pas au masculin, n'est rien de moins qu'étymologique : perclus − qui signifie proprement « qui éprouve de grandes difficultés à se mouvoir », puis, par extension, « qui est entièrement ou partiellement paralysé par l'effet d'une cause passagère » (être perclus de fatigue, de douleur) − est emprunté du latin perclusus, participe passé de percludere, « fermer entièrement, obstruer » (composé du préfixe intensif per- et de claudere, « fermer », lui-même dérivé de clavis, « clé »).

    Évidemment, il se trouvera toujours quelques esprits rebelles prompts à dénoncer les incohérences d'une langue qui préconise d'écrire conclu, exclu mais inclus, occlus, perclus, reclus. Qui sait ? L'uniformisation de l'usage de nos six participes est peut-être... incluse dans le programme du nouveau Premier ministre. Vrai, ce n'est pas exclu !


    (*) Curieusement, la graphie perclue se rencontre plus souvent que la forme masculine perclu : « Les jambes perclues de rhumatismes » (Zola) ; « La mémoire perclue » (Sand) ; « Toute gémissante et perclue » (Céline).


    Voir également le billet Inclus.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Ce gouvernement marqué par (ou qui cumule ?) les échecs et l'impopularité.

     


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  • « Monsieur le ministre, il est une question à laquelle nous devons tous, gauche et droite confondue, répondre avec franchise et lucidité car elle est politique, et non pas idéologique » (lettre ouverte à Benoît Hamon, photo ci-contre).
    (Alain Bentolila,  sur lexpress.fr, le 4 avril 2014)  
     


    (photo Wikipédia sous licience GFDL par Jackolan1)
     

     

    FlècheCe que j'en pense

    La question à laquelle j'aimerais bien plutôt que l'on répondît est la suivante : pourquoi le participe passé confondu s'accorderait-il en genre et pas en nombre ? Mon petit doigt me dit que notre linguiste ne s'est pas posé la question... en amont (de toute autre considération).

    « Toutes choses confondues », lit-on dans le Robert illustré, au sens de « sans faire le détail ». « Toutes classes confondues (...) toutes tendances confondues », ajoute à bon droit l'Académie dans son Dictionnaire. Partant, je ne vois pas bien au nom de quel principe il en irait autrement dans le cas présent : deux singuliers coordonnés par et ne valent-ils pas un pluriel ?

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Gauche et droite confondues.

     


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  • « En scindant Bercy entre le ministère de l'Économie dévolu à Arnaud Montebourg et celui des Finances qui échoue à Michel Sapin, Manuel Valls prend un risque vis à vis des interlocuteurs de la France à Bruxelles. »
    (Géraldine Russel,  sur lefigaro.fr, le 2 avril 2014)  
     
    Manuel Valls (photo Wikipédia sous licience GFDL par Jackolan1) 

     

    FlècheCe que j'en pense

    Sinistre présage que celui adressé par notre journaliste au ministre des Finances fraîchement nommé. C'est que échouer n'est pas échoir !

    Adolphe Thomas est le premier à le reconnaître : « Il faut se garder de confondre ces deux verbes dans la conjugaison : C'est un grand honneur qui m'échoit (et non qui m'échoue). » La confusion est d'autant plus fâcheuse que nos frères siamois, qui pourraient bien ne présenter aucun rapport étymologique entre eux, ont des sens fort différents. Terme de marine, échouer signifie proprement « toucher le fond » puis « s'arrêter » et, au figuré, « ne pas réussir », quand échoir s'emploie au sens de « arriver par hasard ou à échéance » ou, comme dans notre affaire, de « être dévolu ».

    Mais il était écrit qu'un verbe hautement défectif − échoir ne s'emploie guère qu'à la troisième personne du singulier ou du pluriel de certains temps : il échoit, il échut, il échoira, il échoirait, échéant, échu, etc. (*) − serait plus souvent qu'à son tour concurrencé par un paronyme du premier groupe, à la conjugaison autrement régulière. À Bruxelles comme à Paris, le constat est tristement le même : notre journaliste n'est pas le seul à... échouer sur ledit écueil ! Qu'on en juge : « Le saurait-il par hasard qu'il ne lui échouerait aucune fonction particulière » (Élisabeth Badinter, citée par Grevisse), « La longue série de princes héritiers qui, durant tout le siècle, attendraient aux Tuileries une couronne qui ne leur échouera pas » (Georges Poisson), « Il espère bien que ce rôle lui échouera » (Gilberte Émile-Mâle), « C'est au général [...] qu'échouera la responsabilité d'exécuter les dispositions de cet arrêté » (Louis-José Paul), « La puissance juridique qui échoue à ce fils devenant époux » (Michelle Salitot), « C'est à [Rudolf] Barák qu'échoua la tâche de présider la commission d'enquête sur la révision de ces mêmes procès » (Muriel Blaive).

    Nos ministres de choix pourront toujours se consoler en donnant, le cas échéant, un sérieux tour de vis à la dette qui nous échoit.


    (*) Les graphies il échet (pour il échoit), il écherra (pour il échoira) sont considérées comme archaïques.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    En scindant Bercy entre le ministère de l'Économie dévolu à Arnaud Montebourg et celui des Finances qui échoit à Michel Sapin, Manuel Valls prend un risque vis-à-vis des interlocuteurs de la France à Bruxelles.

     


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  • « Mardi prochain, alors que Manuel Valls prononcera son discours de politique générale, François de Rugy n'est pas sûr de voter la confiance au gouvernement. "Nous jugerons sur pièce, sur des actes". »
    (Marc de Boni,  sur lefigaro.fr, le 2 avril 2014)  
     

    Manuel Valls (photo Wikipédia sous licience GFDL par Jackolan1) 

     

    FlècheCe que j'en pense

    Que notre journaliste n'a-t-il plus sûrement voté la confiance à son dictionnaire ! Car enfin, pourquoi conviendrait-il de se faire une opinion en s'appuyant sur plusieurs actes... mais sur une seule pièce − entendez un seul document, une seule preuve matérielle ?

    Force est de constater que ses confrères ne semblent pas davantage perturbés par cette incohérence : « Pas d'emballement donc, nous jugerons sur pièce » (Le Figaro, encore) ; « nous jugerons sur pièce s'il existe des différences entre les promesses de campagne et la réalité du terrain » (La Voix du Nord) ; « Je jugerai sur pièce » (Ouest France) ; « on jugera sur pièce » (La Croix) ; « tout le monde pourra en juger sur pièce » (Midi Libre) ; « Nous jugerons sur pièce » (Le Télégramme) ; « ils devront juger sur pièce » (BFM TV) ; « pour juger sur pièce » (Le Parisien).

    Il n'empêche. Dans notre affaire, le substantif pièce est pris au sens de « écrit servant à établir un droit, à faire la preuve d'un fait », comme dans pièce à conviction. La logique plaide donc en faveur du pluriel dans les locutions juger, décider sur pièces, qui signifient au figuré « se forger une opinion à partir des faits, sans tenir compte des dires d'autrui ». Telle est en tout cas la position de l'Académie, de Bescherelle, de Larousse et de Robert. Mais je vous fiche mon billet qu'il se trouvera toujours un esprit rebelle pour venir tailler cet usage en pièces.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Nous jugerons sur pièces.

     


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  • « Au final, il ne reste pas grand-chose de cette œuvre qui, en dépit de sa mélancolie appuyée, de son constat de génération – le réalisateur et ses deux interprètes principaux appartiennent peu ou proue à la même – semble cruellement dépourvue d’épaisseur » (à propos du dernier film de Claude Lelouch).
    (Arnaud Schwartz,  sur lacroix.com, le 1er avril 2014)  
     

     

    FlècheCe que j'en pense

    Le trait de notre journaliste, quant à lui, a de l'épaisseur à revendre ! C'est que proue, ainsi affublé d'un e superfétatoire, fait mauvaise figure dans le scénario.

    Emprunté du latin prode (« profit »), prou − sans e final − est, selon le Dictionnaire historique de la langue française, « l'emploi adverbial de l'ancien substantif proud (v. 980), pro (v. 1050), prod (1080), prou (v. 1200), [qui] désignait le profit, l'avantage, une chose utile et, avec une valeur quantitative, l'abondance (1050) ». Si le bougre se rencontre encore comme nom sous la plume de La Fontaine − Bon prou vous fasse ! −, il n'a plus guère le vent en poupe dans cet emploi. De nos jours, seule reste vivace la locution adverbiale peu ou prou, littéralement « peu ou beaucoup » (et non « peu ou pas du tout », comme on le croit parfois par contresens), d'où « plus ou moins ». Rien à voir, donc, ni peu ni prou, avec la proue du navire, réfection de proe, probablement emprunté du génois proa, lui-même issu du latin prora (« partie avant d'un vaisseau »).

    Pour l'anecdote, on notera que le terme prou est qualifié de « familier » par Littré, figure de proue des lexicographes du XIXe siècle, quand il ressortit au registre littéraire selon Girodet. Autre temps, autre mode...

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Ils appartiennent peu ou prou à la même génération.

     


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