• Mauvais plan

    « Cdiscount se relance à l'international et dévoile son plan d'actions. »
    (Flore Fauconnier, sur lsa-conso.fr, le 3 juillet 2018)  

     

     

    FlècheCe que j'en pense

    Un lecteur de ce blog(ue) m'interpelle en ces termes : « Dans mes rédactions professionnelles, j'écris un "plan d'actions" car je parle de plusieurs actions. Mais ma direction écrit un "plan d'action" au singulier, ce qui donne à penser que nous planifions une seule action. Merci de votre retour éclairé. »

    C'est le sens, répondent en chœur les spécialistes de la langue, qui doit nous guider en cas d'hésitation sur le nombre du complément du nom, encore appelé complément déterminatif. Et force est de constater, en l'espèce, que les auteurs n'hésitent pas beaucoup : « Qui concevra qu'un être sans organes puisse avoir des pensées, des volontés, un plan d'action ? » (texte anonyme daté de 1779), « Improviser à la hâte un plan d'action » (Charles Baudelaire traduisant Edgar Allan Poe, 1875), « Un nouveau plan d’action pour une armée de 90 000 hommes » (Ferdinand Foch, 1920), « Celui qui nous apporterait un plan, même risqué, mais un vrai plan d'action » (Jules Romains, 1932), « La chambre de compensation [...] entre plusieurs mécanismes, plusieurs plans d'action » (Albert Thibaudet, avant 1936), « Le plan d'action serait le suivant » (De Gaulle, 1954), « Envisager avec lui un plan d'action » (Jean Dutourd, 1993). Même unanimité du côté des ouvrages de référence : tous ceux qui, à l'instar de Larousse, Robert, le TLFi, l'Office québécois de la langue française et le Dictionnaire du français de Josette Rey-Debove, consignent ladite expression ne l'écrivent qu'avec action au singulier... sans toutefois prendre la peine de justifier leur choix. Alors quoi ? Les hésitations de mon correspondant (et de la plupart des usagers) ne seraient-elles pas légitimes ?

    Plan, dans l'emploi qui nous occupe, désigne l'ensemble des dispositions adoptées en vue de la réalisation d'un projet, de l'atteinte d'un objectif. C'est parce qu'un tel plan comporte d'ordinaire une liste détaillée des actions à mener que grande est la tentation d'écrire plan d'actions avec actions (« ce qu'on fait ») au pluriel. Tout porte pourtant à croire que le substantif action s'entend bien plutôt ici au sens de « exercice de la faculté d'agir » et sert à déterminer la nature dudit plan : un plan d'action par opposition à ce que l'on pourrait appeler un plan d'intention, comme on parle d'un homme d'action (« personne portée à avoir une grande activité, tournée vers les réalisations concrètes ») par opposition à un homme de réflexion.

    Vous l'aurez compris : les petits plaisantins qui, dans le feu de l'action, mesurent l'ambition d'un plan d'action à la présence ou à l'absence de la marque du pluriel à action en seront pour leurs frais... 

    Remarque : La graphie plan d'actions se trouve dans les Mémoires du marquis d'Argenson (avant 1757), mais avec actions pris cette fois au sens financier de « titres négociables représentant une participation au capital d'une société » : « [Ils] avoient un plan d'actions sur les fermes qui devoit nécessairement pâlir devant le funeste clinquant des actions mississipiennes. »

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    La société dévoile son plan d'action.

     

    « Plaît-il ?Que (dus)sais-je ? »

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