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Visite éclair(e)
« Centrafrique : l'incident qui a émaillé la visite de François Hollande à Bangui (...) François Hollande aurait été menacé par des membres de la Séléka lors de sa visite éclaire en Centrafrique. »
(paru sur atlantico.fr, le 15 décembre 2013)
(photo Wikipédia sous licence GFDL par Jean-Marc Ayrault)Ce que j'en pense
J'entends déjà les mauvaises langues dénoncer un triste exemple d'article émaillé de fautes grossières.Il est certain que voir le substantif apposé éclair ainsi ravalé au rang d'adjectif et « accordé » au féminin avec visite vaut son pesant de moutarde (Maille). Est-il besoin de préciser que l'expression visite éclair est l'ellipse de « une visite à la vitesse de l'éclair », nom masculin qui s'écrit sans e final ?
Mais il n'y a pas que cet éclair(e) qui me reste en travers de la gorge : le choix du verbe émailler − oserai-je l'avouer ? − ne me dit rien qui vaille. Émailler (« recouvrir d'émail », au sens propre) ne s'emploie-t-il pas en effet, dans la langue littéraire, au sens de « orner en parsemant de couleurs vives » (un ciel émaillé d'étoiles) et, au figuré, pour « agrémenter (un ouvrage, un récit...) de détails ou d'ornements divers » (un dictionnaire émaillé d'illustrations) − de là le tour ironique (un texte) émaillé de fautes d'orthographe ? Partant, on est fondé à se demander si un unique incident, quelque fâcheux qu'il puisse être, est à même d'émailler quoi que ce soit, tant ledit verbe exige dans cette construction un sujet au pluriel (sur le modèle des étoiles qui émaillent le ciel, des illustrations qui émaillent un dictionnaire, des fautes d'orthographe qui émaillent un texte). Vrai, il n'y a qu'émaillent qui m'aille !
Voir également le billet Apposition.Ce qu'il conviendrait de dire
L'incident qui a eu lieu (ou qui a éclaté) lors de la visite de François Hollande à Bangui.
Tags : visite éclair, émailler
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Commentaires
Les journalistes ont la fâcheuse manie de prendre le verbe « émailler » dans les sens de : ponctuer, troubler, perturber, ternir, gâcher, etc. La ministre de l'Éducation nationale regrette les incidents qui ont émaillé la minute de silence à l'école (Le Point, 15.01.2015).