« Mais cette croissance à la vitesse grand V s'est faite aux dépends d'autres équipements informatiques » (à propos du marché des tablettes tactiles).
(Clémence Dunand, sur lesechos.fr, le 22 octobre 2013)
(photo Wikipédia sous licence GFDL par Blake Patterson)
Ce que j'en pense
Notre journaliste aurait-elle oublié de noter sur ses tablettes que la locution aux dépens de a bien plus à voir avec dépenser qu'avec dépendre, eu égard à l'étymologie ?
Emprunté du latin dispensum, participe passé neutre substantivé de dispendere (« peser en distribuant, partager ; distribuer ») à l'origine de l'adjectif dispendieux, dépens est un ancien nom masculin pluriel qui n'est plus guère employé au sens propre de « frais, ce que l'on dépense » que dans le vocabulaire juridique, la langue usuelle lui ayant depuis longtemps préféré dépense(s). Il subsiste dans la locution prépositive aux dépens de, qui signifie proprement « aux frais de » (Il vit grassement, il s'est enrichi à mes dépens) et, figurément, « au détriment, au préjudice de » (Apprendre quelque chose à ses dépens).
Rien à voir, donc, avec la forme conjuguée du verbe dépendre, emprunté du latin dependere : (je, tu) dépends. C'est pourquoi on veillera à ne pas affubler notre substantif (toujours employé au pluriel, à l'instar de frais) d'un d que rien ne justifie. La Fontaine ne s'y est pas trompé, lui qui écrivait en 1668 : « Apprenez que tout flatteur / Vit aux dépens de celui qui l'écoute. » Après tout, cette leçon vaut bien un fromage et une tablette... de chocolat !
Ce qu'il conviendrait de dire
Cette croissance s'est faite aux dépens d'autres équipements informatiques.