« Rouler la caisse : Se dit d'un coureur qui démarre à tout bout de champs, qui en fait trop. Il s'expose à quelques retours de bâton de la part des ses adversaires, voire de ses partenaires. »
(paru sur editions-larousse.fr)
Ce que j'en pense
Grande fut ma surprise de découvrir, sur le site des Éditions Larousse, cette définition extraite de l'ouvrage Le Tour, 100 ans de légende. Loin de moi l'intention de rouler ici des mécaniques, mais il m'avait toujours semblé que dans l'expression figurée et familière à tout bout de champ, qui signifie « à chaque instant, à tout propos », champ devait s'écrire au singulier. Ne s'agissait-il pas, à l'origine, d'évoquer le travail répétitif du paysan labourant sans relâche son champ, d'un bout à l'autre ? (*) De fait, l'Académie confirme : Il m'interrompt à tout bout de champ (notez au passage l'absence de trait d'union, contrairement à la locution voisine sur-le-champ, au sens de « tout de suite »).
Fausse analogie avec temps ? Persistance d'un s qui se voudrait étymologique (champ est issu du latin campus, « plaine ») ? Simple étourderie ? Peu importe : Larousse doit choisir son camp et éviter de venir nous mettre des bâtons dans les roues en cédant à la tentation de ce... tour au pluriel .
Mon petit doigt − qui en connaît un rayon − me souffle que le stagiaire qui s'occupe dudit site devait avoir ce jour-là... la tête dans le guidon. De là à ce que l'on apprenne qu'il a depuis pris la clef des champs.
(*) À moins qu'il ne s'agisse d'une allusion au champ des joutes ou au champ de bataille, « l'idée d'une répétition rapide et incessante du même propos ou du même acte s'accord[ant] mal avec la lenteur des travaux des champs » (selon Jacques Cellard). Toujours est-il, d'après le Dictionnaire historique de la langue française, que ladite expression « réalise une métaphore qui va du sens spatial au sens temporel, "sans cesse" ».
Remarque 1 : En revanche, on écrira correctement : (prendre, aller, couper) à travers champs.
Remarque 2 : La locution à tout bout de champ, attestée au XVIe siècle − « [Ils] s'en [= des chevaux] servoient à tout bout de champ » (Jérôme de Chomedey, 1568) −, a connu plusieurs avatars : « Comme font les coqs a chascun bout de champ » (Louis de Beauvau, vers 1455), « Ilz fanfreluchoient à chasque bout de champ » (Rabelais, 1534), dont certains... avec champs orthographié au pluriel : « D'autant qu'ilz seriont arrestés à chasque bout de champs » (Jan de Berghes, 1564), « À tous bouts de champs » (Jean de Lavardin, 1579), « Ils s'escrient et nous desmentent à tout bout de champs » (André Rivet, 1609).
Ce qu'il conviendrait de dire
Un coureur qui démarre à tout bout de champ.