L'ivresse que procurent les fines bulles de champagne ne saurait justifier la confusion entre les expressions sabler le champagne et sabrer le champagne.
Sabler un verre (de vin, de champagne), c'est « le boire d'un trait », « faire cul sec ».
En une heure, il a sablé quatre verres de vodka.
L'origine de cette expression a donné lieu à maintes hypothèses. Selon Littré, la tradition (aux XVIIe et XVIIIe siècles) voulait que l'on préparât la flûte en soufflant dedans pour la couvrir de buée, avant de la saupoudrer avec du sucre et de verser ensuite dans cette gaine de sable le champagne qui y moussait abondamment et réclamait alors qu'on le bût vite et d'un trait. D'autres évoquent la méthode qui consistait à plonger la bouteille dans du sable pour en conserver la fraîcheur. Plus généralement admise est l'explication fondée (justement...) sur la comparaison entre le fondeur qui coule la matière en fusion dans un moule de sable (on parle de sablage) et le buveur qui jette précipitamment le liquide dans son gosier. Même si l'on peut légitimement s'interroger sur l'intérêt qu'il y a à boire du champagne d'un trait...
De nos jours, sabler le champagne signifie « boire du champagne à l'occasion d'une cérémonie, d'une réjouissance ou de tout évènement digne d'être fêté ».
Le réveillon du jour de l'an est une excellente occasion de sabler le champagne.
Est-ce sous l'attraction du paronyme sabrer que l'expression sabler le champagne a été déformée en sabrer le champagne, au début du XIXe siècle ? Cela expliquerait en tout cas pourquoi cette dernière n'est pas reconnue par l'Académie. Pour autant, rien n'empêche les plus audacieux de sabrer le champagne, à l'instar des célèbres hussards de la garde napoléonienne, dont on raconte qu'ils avaient pris pour habitude de fêter leurs victoires (nombreuses, au début) en faisant sauter le goulot des bouteilles d'un revers de lame. Geste bien plus spectaculaire, convenons-en, que le sablage du fondeur et qui perdure au sein des grandes maisons de Champagne et de certaines institutions militaires.
En résumé
On retiendra qu'il est tout à fait possible de sabrer le champagne (= faire sauter le goulot de la bouteille d'un coup de lame)... avant de le sabler (= le boire d'un trait). Les deux expressions ne sont donc pas interchangeables. |
Personnellement, je préfère le sabler !