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Mollo sur les consonnes doubles

« Et quelles sont ces rénovations ? Des immeubles démollis ou de la  simple rénovation de façade ?  »
(Stéphane Milhomme, sur francebleu.fr, le 18 juin 2015) 

(photo Wikipédia sous licence GFDL par Franck.schneider)

FlècheCe que j'en pense


Je confesse avoir fait la moue : c'est qu'il ne vous aura pas échappé que démolir s'écrit avec un seul l, contrairement à mollir. Rien à voir, au demeurant, entre nos deux paronymes : le premier est emprunté du latin demoliri (« mettre à bas, faire descendre ; détruire, renverser ») − lui-même formé de la préposition de et de moliri (« déplacer avec peine ; construire ; entreprendre »), dérivé de moles (« masse ») − quand le second est issu, par l'intermédiaire de l'adjectif mou, du latin mollis (« tendre, mou »).

Les esprits rebelles auront beau arguer que la graphie avec consonne double se trouve chez Coquillart (« Pour desmollir rampars ») et chez Rabelais (« es aultres desmolloyt les reins »), inutile de nous laisser bourrer le mou : à cette époque, lointaine, où l'usage orthographique était encore mal établi, les anciens hésitaient tout autant entre les variantes amollir et amolir (au sens de « rendre mou ; affaiblir »), si l'on en croit Littré et Féraud. Un vrai molli-mélo ! De nos jours, la distinction entre les deux familles est plus nette : tous les préfixés de mollir (amollir, ramollir) prennent logiquement deux l ; quant à démolir, seule la forme avec un l a encore pignon sur rue... à moins d'accepter pour définition du néologisme démollir celle proposée par le facétieux Dictionnaire des verbes qui manquent : « sortir de sa torpeur ».

Remarque 1 : La coquille ne date pas d'hier. En 1842, Louis-Nicolas Bescherelle − qui n'avait pourtant rien d'une chiffe molle − optait ainsi, dans son Dictionnaire usuel de tous les verbes français, pour la graphie avec un l à l'entrée « démolir »... mais avec deux à l'entrée « raser » (« Démollir entièrement »). La faute à un petit coup de mou ?

Remarque 2 : On ne s'étonnera pas de trouver la graphie démollition (au lieu de démolition) sous la plume de notre journaliste, qui fait là preuve d'une fâcheuse conséquence !

 

Flèche

Ce qu'il conviendrait de dire


Des immeubles démolis.

 

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M
Bonjour Mr Marc, puisqu'il n'est pas appelé: un chat("sans aucune marque de dédain...!"), car un chat est un chat. Et oui nous les "dyslecteurs" de tout poil, prenez garde de nous carresser dans le bon sens du poil j'entend, de toutes plumes et, mais aussi, de tous cotés...! Avons avec les consonnes longues de gros problèmes; idem pour de nombreux dyscalculiques en tous genres. Avec Parler Français Eklablog se corriger en s'amusant et travailler son Français a toutes fins utiles; de retrouver l'estime de soi et ainsi de s'épanouir toujours plus, immenses et grandioses ivresses, quelle ivresse sans f(l)acons!!! en plus on n'y laisse pas ses/sa plume. Merci. Bye. Mich.
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M
Que voulez-vous, la coquille se trouve jusque dans les colonnes de nos dictionnaires : "Exemples de conjugaison avec l'auxilliaire être (...) avec l'auxilliaire avoir" (Dictionnaire du français de Josette Rey-Debove).
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V
Il y a comme ça des consonnes doubles qui s'imposent à l'esprit des meilleurs lettrés, et qui reviennent sous leur plume de manière presque automatique. Un de mes anciens patrons, inspecteur d'académie, agrégé d'Espagnol, fin lettré et plein d'humour, avait un jour annoté la lettre d'un proviseur qui se plaignait de non-remplacements endémiques dans son lycée, en griffonnant : "Voir si l'on a des maîtres auxilliaires". On s'est bien gardé de le lui signaler, sachant qu'il bifferait rageusement le L superflu en bougonnant : "Et alors... Vous savez bien que je cherche des personnels volants !"
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