« En hommage aux victimes des attentats du 13 novembre, François Hollande appelle les Français à "pavoiser" de drapeaux tricolores leurs maisons. »
(Tony Selliez, sur francebleu.fr, le 26 novembre 2015)
(photo Vincent Boisot / Le Figaro)
Ce que j'en pense
Il ne vous aura pas échappé que le verbe pavoiser vient d'être mis à l'honneur par le président de la République, dans les circonstances troublées que l'on sait. Le mot est dérivé de pavois, lui-même issu, par l'intermédiaire de l'italien pavese (« bouclier »), du latin pavensis, « (objet) de Pavie », cette ville étant apparemment réputée pour la qualité des armes que l'on y fabriquait. Pavois a d'abord désigné un grand bouclier ovale ou rectangulaire, en usage au Moyen Âge : « Lorsqu'un roi franc était élu par les guerriers nobles, il était hissé sur le pavois et promené aux yeux de son armée », apprend-on dans la neuvième édition du Dictionnaire de l'Académie. L'expression figurée élever, hisser sur le pavois (« mettre en grand honneur, en grande renommée, glorifier ») conserve le souvenir de cette tradition franque.
C'est − d'après le Dictionnaire historique de la langue française, cette fois − parce que l'on en garnissait le bord supérieur des navires pour se protéger que pavois s'est employé par extension comme terme de marine, d'abord au pluriel, pour désigner les grandes pièces de toile tendues et destinées à cacher l'équipage à l'ennemi (lesquelles devinrent par la suite un pur ornement de parade). Aussi ne s'étonnera-t-on pas d'apprendre que le verbe pavoiser a suivi la même évolution, passant du sens (passif) d'« être muni d'un bouclier » à celui (actif) de « parer le bateau de ses pavois », puis, par analogie, de « garnir de drapeaux les maisons, les édifices publics d'une ville, à l'occasion d'une fête, d'une cérémonie » : pavoiser une rue pour le 14 Juillet. Le bougre s'emploie aussi absolument (On pavoise dans toute la France pour le 14 Juillet), et au sens figuré − et quelque peu familier − de « manifester sa joie, sa fierté de manière ostentatoire ». On se gardera surtout d'imiter l'exemple de Ségolène Royal qui, lors de la campagne présidentielle de 2007, avait bien imprudemment exhorté chaque foyer français à « pavoiser le drapeau tricolore à ses fenêtres le jour de la fête nationale ». Las ! force est de constater, avec l'exemple qui nous occupe, que ladite impropriété s'est depuis hissée au rang des pléonasmes de la plus belle eau. Quand on vous dit qu'il n'y a pas de quoi pavoiser...
Ce qu'il conviendrait de dire
En hommage aux victimes des attentats du 13 novembre, François Hollande appelle les Français à pavoiser leurs maisons.