Il faut croire que le français est riche pour parler des pathologies. Ainsi ne compte-t-on pas moins de quatre synonymes pour désigner ce qui peut provoquer ou favoriser l'apparition d'un cancer : cancérigène, cancérogène, carcinogène et oncogène.
Des substances cancérigènes (ou cancérogènes, carcinogènes, oncogènes).
Les deux premiers adjectifs sont composés du substantif cancer (« tumeur maligne ») − lui-même tiré du latin cancer, cancri, traduction du grec karkinos (« crabe, écrevisse ») − et du suffixe -gène, emprunté du grec gennân (« engendrer »). Le troisième est composé de carcino-, tiré du grec karkinos déjà évoqué. Quant au dernier, il utilise le préfixe onco-, tiré du grec ogkos (« grosseur, tumeur »).
Hanse constate que « cancérigène l'emporte nettement sur cancérogène » (j'ajoute : auprès du grand public), mais Bescherelle note de son côté que ce dernier, construit « sur le modèle de pathogène, anxiogène, tend à remplacer cancérigène, moins bien formé », quoique plus ancien.
Il est vrai que plus d'un puriste de la langue considère le terme cancérigène comme incorrect, sous prétexte que le premier élément des composés savants d'origine grecque reçoit ordinairement la finale -o (et non -i, réservée aux éléments latins) (*). Du reste, ne parle-t-on pas de cancérologie et de cancérologue... et non de cancérilogie ? (on dit également carcinologie et oncologie). Toujours est-il que l'Académie de médecine recommande d'employer cancérogène... quand l'Académie française ne fait aucune différence entre les deux termes. Quel panier de crabes !
(*) Aussi bien paraît-il plus cohérent d'opter pour carcinogène, irréprochable, plutôt que pour une forme hybride à préfixe latin et à suffixe grec.
Remarque : Sans entrer dans des détails trop techniques, précisons que certains font la distinction entre cancérogène (« qui favorise l'apparition d'un cancer »), cancérigène (« qui favorise le développement d'un cancer ») et oncogène (« qui favorise le développement des tumeurs »). D'autres encore font remarquer que tous les cancers ne sont pas forcément des carcinomes. Pas simple...
Son concurrent cancérigène a du plomb dans l'aile...
(Éditions EDP Sciences)