Il existe deux formes associées au verbe bénir, béni et bénit, que l'on se gardera de confondre.
Bénit(e), avec un t ne se prononçant pas au masculin, est employé uniquement comme adjectif pour parler des choses consacrées par une bénédiction rituelle. Béni(e) est, quant à lui, utilisé comme forme verbale (participe passé avec l'auxiliaire être ou avoir) ou comme adjectif dans toutes les autres acceptions, en parlant des personnes ou des choses.
De l'eau bénite et des cierges bénits (= qui ont été l'objet d'un rite liturgique de bénédiction).
C'est (du) pain bénit (= cela tombe à point, c'est une aubaine, c'est bien mérité).
Une médaille bénite est une médaille qui a été bénie par un prêtre.
Cet homme est béni des dieux ! (= sur qui s'exerce la protection des dieux).
Béni soit le jour où je t'ai rencontrée. C'était une époque bénie (= heureuse).
Remarque 1 : Si bénit (issu du latin benedictum, puis de beneit, participe passé de benëir, forme ancienne de bénir) est antérieur à béni, les deux formes furent longtemps indifféremment employées comme participe passé. La distinction ne s'est fixée qu'au XIXe siècle sur le critère du caractère rituel (bénit) ou non (béni) de la bénédiction, mais sans réellement obtenir la sanction de l'usage. Aussi la plupart des grammairiens préconisent-ils aujourd'hui de réserver à bénit son rôle d'adjectif (limité au domaine rituel) et à béni sa fonction verbale (même quand il s'agit d'une bénédiction rituelle, dès lors que l'on perçoit une forme verbale plutôt qu'une épithète : Cette médaille a été bénie par le pape, de préférence à Cette médaille a été bénite par le pape).
Remarque 2 : Béni se construit avec de (parfois avec par) et bénit avec par.
Remarque 3 : Dans le registre familier et péjoratif, on parle d'un cul-bénit (= personne bigote / des culs-bénits) et d'un béni-oui-oui (nom masculin invariable désignant une personne servile, emprunté de l'expression algérienne créée durant la période coloniale, formée de l’arabe beni, pluriel ben, fils, et de oui oui exprimant un accord systématique). Quant à l'expression ambitionner sur le pain bénit (= exagérer), elle trouve son origine dans la coutume qui voulait que chaque ménage, à tour de rôle, apporte à l'église du pain en vue de le distribuer aux fidèles, rituel qui donna lieu à de nombreux abus.
(Éditions du Seuil)