Le sens premier de l'adverbe autrement est « d'une façon autre ».
Cela s'est passé tout autrement.
Autrement dit (= en d'autres termes).
Accompagné d'une négation, autrement a vu son sens initial glisser vers celui de « (pas) beaucoup, spécialement ».
Il ne s'en est pas autrement formalisé.
De là, peut-être, l'emploi fréquent de autrement dans des comparaisons, au sens de « beaucoup plus, nettement plus ».
Il est autrement intelligent que moi.
Ce plat est autrement bon (tour elliptique).
Si la langue élégante et soutenue se plaît à substituer dans ce sens autrement à plus, on se gardera d'utiliser conjointement les deux termes. En effet, autrement ayant à lui seul valeur de comparatif de supériorité, l'ajout de plus relèverait à coup sûr du pléonasme !
Ce travail est autrement difficile (de préférence à autrement plus difficile).
Ceux qui éprouvent le besoin impérieux de renforcer la comparaison gagneront à éviter ce « tour familier » (Hanse), que dis-je, cet usage « autrement plus déplorable [que celui de par contre] » (Gide), en recourant à bien plus, beaucoup plus : Ce travail est bien plus difficile. (*)
Autrement dit, autrement se suffit à lui-même comme comparatif de supériorité : inutile de faire appel à Monsieur Plus !
(*) On a dit dans le même sens tout autrement, bien autrement : « Une image de soy mesme tout autrement belle que ne feroit le plus excellent peintre du monde » (Jean Hugues Quarré, 1632), « C'étoit un homme de plaisir, mais son fils l'étoit bien autrement que lui » (Gédéon Tallemant des Réaux, avant 1692), « Elle avait l'air aussi jeune et bien autrement séduisante » (Stendhal, 1839). Puis, note Goosse, « autrement seul est devenu de plus en plus fréquent et les deux autres de plus en plus rares ».
Remarque 1 : L'honnêteté m'oblige à préciser que le tour critiqué autrement plus, que Thomas qualifie de « relativement récent » et dont Grevisse fait remonter l'origine au XXe siècle, ne date pourtant pas d'hier. Ne lit-on pas dans un ouvrage paru en 1556 : « [Le péché] devint beaucoup plus grand, et autrement plus mauvais, et pernicieux » ? De quoi conforter nos dictionnaires usuels dans leurs dispositions particulièrement bienveillantes à l'égard dudit pléonasme : « (Renforçant un comparatif de supériorité ou d'infériorité). C'est autrement moins réussi. Autrement plus grand » (Grand Robert).
Remarque 2 : Autrement signifie aussi « dans le cas contraire ; sinon, sans quoi » : Parlez fort, autrement il ne vous entendra pas.
Pour une fois qu'une publicité est
irréprochable sur le plan de la syntaxe !...