La confusion entre affabuler/affabulation et fabuler/fabulation est courante... parfois même entretenue par des dictionnaires peu scrupuleux (cf. Remarque 2).
Empruntée du latin affabulatio, affabulation désigne au sens strict la moralité d'une fable (= la partie qui en explique le sens moral), puis par extension la trame d'un récit, l'intrigue d'une pièce. Quant au verbe affabuler, il signifie « agencer l'intrigue d'une œuvre ».
Voici en deux mots l'affabulation de ce roman.
Affabuler un récit (= organiser la trame du récit).
C'est donc à tort, selon l'Académie, que l'on associe au couple affabuler/affabulation l'idée de rapporter les faits de manière infidèle, qui relève en fait de fabuler/fabulation : empruntée du latin fabulatio (« discours, conversation », puis « bavardages mensongers »), fabulation désigne en effet l'action de fabuler, c'est-à-dire d'inventer des histoires présentées comme vraies. On notera, du reste, que l'Académie donne pour définition de mythomanie : « Tendance à fabuler, à inventer des récits mensongers ».
La fabulation caractérise certains états pathologiques.
Toute cette histoire n’est que mensonges et fabulations.
Remarque 1 : On notera que le verbe affabuler est transitif direct (on affabule quelque chose) tandis que fabuler, dans son sens moderne, est intransitif (on fabule).
Remarque 2 : Le Larousse illustré 2005 entretient la confusion, en proposant une définition spécieuse d'affabulation : « Arrangement de faits imaginaires, invention plus ou moins mensongère. » Arrangement de faits imaginaires pourrait convenir si l'on entend par là « arrangement des faits constituant la trame d'un ouvrage d'imagination », mais invention plus ou moins mensongère doit être réservé à fabulation si l'on s'en tient à la définition donnée par l'Académie.
Remarque 3 : Un internaute, qui se fait appeler Archaon12, fait remarquer que « la distinction [entre affabulation et fabulation] n'est pas toujours facile et, dans certains cas, les deux [idées] se mélangent : par exemple, quand Choderlos de Laclos, dans sa préface des Liaisons Dangereuses, indique qu'il s'agit d'un véritable échange épistolaire dont il n'est que le compilateur et pas l'auteur, il fabule ses affabulations ». Plus justement, on dira, à propos de l'affabulation de son récit, que Choderlos de Laclos fabule, en ce sens qu'il prétend livrer une correspondance authentique.
Par ailleurs, reconnaissons que la distinction n'est pas toujours aisée à l'oral : la fabulation se prononce comme l'affabulation.
Remarque 4 : Le substantif fabulateur désignait autrefois un conteur, un auteur de récits, aujourd'hui une personne qui, consciemment ou non, invente des histoires qu'elle présente comme vraies.
Curieusement, on ne trouve nulle trace du substantif affabulateur du côté de l'Académie.
Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos :
fabulation et affabulation.