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Histoire louche

« Dominique Pelicot écope de la peine maximale, 20 ans de réclusion criminelle. »
(paru sur lefigaro.fr, le 19 décembre 2024.)

FlècheCe que j'en pense


Belle unanimité syntaxique de la presse francophone pour rendre compte du verdict dans l'affaire des viols de Mazan : Dominique Pelicot « écope de vingt ans de prison » (Le Parisien, La Croix, RFI, La Tribune de Genève, Radio-Canada), « a écopé de vingt ans de réclusion » (Le JDD, Radio France), « écope d'une peine de 20 ans de réclusion criminelle » (journal suisse Blick), etc. Seulement voilà : l'Académie ne l'entend pas de cette oreille. Contre toute attente, elle distingue, dans la dernière édition de son Dictionnaire (1992), écoper quelque chose, familier, « être frappé d'une peine pour une infraction, un délit » : Le malfaiteur a écopé trois ans de prison et écoper de quelque chose, populaire, « subir des reproches, endurer des épreuves, recevoir des coups sans pouvoir se défendre » : Le malheureux a écopé d'un mois d'hôpital(1) Vous parlez d'un scoop !
Goosse ne cache pas sa perplexité : « Cette répartition paraît peu sûre. Pour le niveau de langue, le TLFi se contente d'une seule étiquette, familier, et le Robert 2001 n'en met aucune. Quel que soit le sens, les deux constructions sont attestées. Écoper quelque chose, usité d'abord, a dominé longtemps [mais] écoper de semble désormais prédominer. » C'est ce que nous nous proposons de vérifier.

À l'origine est le substantif féminin écope, attesté en moyen français sous diverses graphies (escope, escoppe, scoupe, escoupe...) : « Vendre seil [= seau] mellei avoec seil de Poitau as escopes » (Registres de la ville de Saint-Omer, fin du XIIIe siècle), « Scoupes et autres ouvraiges de forghe pour le ville » (Comptes de la ville de Mons, 1331), « Escoppes a geter eaue » (Comptes du clos des galées de Rouen, 1382). Le mot désigne un ustensile en forme de pelle, à bords relevés et à manche plus ou moins long, qui sert particulièrement à puiser et évacuer l'eau accumulée au fond d'une embarcation. De écope on a fait écoper, apparu en 1837 (selon le Dictionnaire historique de la langue française) au sens propre de « vider (l'eau d'une embarcation) avec une écope ». En 1837 seulement ? Quand on sait que baqueter « retirer l'eau avec un baquet » est en usage depuis 1364, on peine à croire que la langue ait attendu le XIXe siècle pour porter écoper sur les fonts baptismaux. Et, de fait, les dictionnaires d'ancienne langue attestent diverses formes esco(l)per, escou(l)per, mais dans des acceptions (« cracher », « couper », « nettoyer, balayer », « disculper »...) qui ne coïncident guère avec celle qui nous occupe. Toujours est-il que c'est au cours des années 1800 que le verbe écoper s'est répandu comme terme de marine et de batellerie, dans des emplois exclusivement transitifs directs (ou absolus) :

« Les marchands seront prévenus [...] de faire écoper ou vuider les eaux » (Instruction sur le mesurage des toues de charbon de terre, 1815), « Une méchante embarcation [...] où gicle par filets le flot qu'on écope » (Alexandre Arnoux, 1944).

(par métonymie) « Un mariage pouvait le mettre à flot en écopant sa barque pleine des eaux de la dette » (Balzac, 1837), « Le clapotement de l'eau troublée par quelque marinier écopant son bateau » (Émile Gaboriau, 1870), « [Le bateau] a besoin d'être écopé » (Hervé Bazin, 1972).

(par extension) « On opéra cette démolition en écopant l'eau à l'intérieur de la fondation [d'un pont] » (Annales des ponts et chaussées, 1840), « On l'avait trouvé écopant la boue de la cave » (Pierre Gamarra, 1951), « On s'acharne à écoper ce sable liquide » (Jean-Paul Clébert, 1977).

(par métaphore) « Écoper [une larme] du bout du doigt » (Eugène Deligny, 1874), « Tout ce sommeil en retard, il faut l'écoper patiemment » (Gilbert Cesbron, 1972), « Les vents se plaisaient à écoper la mer de Chine » (Jean Echenoz, 1987).

(absolument) « [Le bateau] embarque un peu d'eau. Si cela continue, il faudra écoper » (Alfred Delvau, 1866), « Le canot est plein d'eau ; il faut écoper » (Alphonse Daudet, 1884), « Arthur [= un matelot] eut à écoper dur » (Blaise Cendras, 1949), « Une sorte de marée noire s’infiltre dans la langue [...]. Alors, nous ici, nous écopons » (Maurice Druon, 1998).

Par analogie, écoper s'est employé en argot aux sens de « pisser (= vider sa vessie) » (cf. écluser), de « manger (= vider son assiette, à coups de cuillère ou de fourchette) » et, surtout, de « boire (= vider son verre, à petites gorgées) » (2). Dans tous ces cas, le complément d'objet désignant ce qui est vidé (ou prélevé) se construit encore directement :

« Écoper sa vessie » (Alfred Delvau, Dictionnaire érotique moderne, 1864) (3) ; « Une femme écopait sa barquette » (Hubert Krains, 1888), « Écoper la kacha [= bouillie] à demi-cuillerées » (Jean Cathala, 1981), « J'écopais une grosse bolée de langues de morue » (Yann Queffélec, 2013) ; « Allons, écopons encore une verre » (Henri Chivot et Alfred Duru, 1859), « Buvant une goutte par-ci et écopant un canon par-là » (Jules Boulabert, 1867), « [Il] écopa une autre gorgée d'eau-de-vie » (Didier Coste, 1972), « Écoper un verre » (Martine Courtois, 1984), « Écoper le brûle-ventre d'une bouteille entamée » (Anne Forgeois, 1985), « Écoper un verre de bière » (Magali Favre, 2011), « Il écopa : et la cale et une bouteille de vieux marc de Bourgogne » (Gabriel Di Domenico, 2014), « [Il] huma le liquide ambré, en écopa une petite gorgée » (Daniel Braud, 2015). (4)

De boire à trinquer il n'y a qu'un pas, fût-il mal affermi, et c'est, nous dit le Dictionnaire historique, « selon la même métaphore que pour trinquer (le coup doit être "absorbé") » que écoper a pris le sens de « subir, essuyer, recevoir (un mauvais coup, ressenti physiquement, matériellement ou moralement, intellectuellement) ». Lorédan Larchey y voit plutôt une « allusion à l'ennuyeuse corvée de canotage qui consiste à écoper » (Nouveau supplément du Dictionnaire d'argot, 1889), quand d'autres le rattachent à l'idée (sadique) de « frapper [un mousse] avec l'écope » (Gaston Esnault, Le Français moderne, 1946) ou le font dériver de l'ancien français colp, issu du bas latin colpus « coup de poing » (Louis Thuasne, Epistole et orationes, 1903). Peu importe. Le fait est que c'est avec cette acception figurée que les hésitations syntaxiques ont commencé. Qu'on en juge :

(le complément désigne un coup physique) « Quand on écoppe une pareille raclée » (Huysmans, 1879), « Il a écopé un fameux coup de poing » (Glossaire patois de l'Ille-et-Vilaine, 1885), « J'ai écopé un coup de bince [= couteau] sur le caillou » (Georges Delesalle, 1896), « [Il] a écopé un sale coup au bras gauche » (Abel Hermant, 1916), « Pas un seul n'eût écopé de lui le hasard d'un coup de pied au cul » (Pierre Magnan, 1940), mais « Ayant écopé d'un coup de soulier en pleine gueule » (Jules Lermina, 1883), « [Il] écopa d'un coup de tête qui le mit hors de lutte » (Camille Lemonnier, 1898), « Sans écoper d'une chiquenaude » (Claude Farrère, 1915).

(le complément désigne un projectile) « Si j'écope un pruneau » (Jean Dargène, 1889), « Ayant écopé une balle dans l'épaule » (Martial Moulin et Pierre Lemonnier, 1894), « Notre baleinière a écopé un obus » (lettre d'un matelot, 1915), « J'ai écopé un éclat [d'obus] » (Jean Taboureau, 1916), mais « Il écopait d'un boulet dans la tête : décapité net ! » (Gustave Nercy, 1897), « Vous êtes aux premières loges pour écoper d'un obus » (Paul Bourget, 1925), « J'ai écopé d'un éclat d'obus dans le flanc gauche » (Margravou, 1943), « C'est nous qui écopions de ces milliers et milliers de balles » (Cendras, 1946), « J'ai écopé d'un pruneau dans le bras » (André Héléna, 1949).

(le complément désigne quelque chose de fâcheux : corvée, punition, reproche, peine, maladie...) « J'ai écopé mon abattage [= forte réprimande] » (Denis Poulot, 1870), « J'ai écopé un violent mal de tête » (Joseph Mullender, 1875), « Tu n'écopperas peut-être pas la centrouse [= prison centrale] » (Hogier-Grison, 1887), « Ils écopent les corvées » (Huysmans, 1891), « Votre femme écopera d'elle quelques mots désagréables » (Goncourt, 1894), « Histoire sans doute d'écoper une punition » (Le Petit Champenois, 1913), « [Il] écope une retenue » (Romain Coolus, 1927), « Comme s'il venait d'écoper une contravention » (Colette, 1934), mais « Lescure a écopé de pas mal de braise » (Paul Mahalin, 1870), « C'est M. Richard qui écoppait de la corvée » (journal La Silhouette, 1892), « Attention ! Nous allons écoper d'une tournée de Pater » (Jean Richepin, 1893), « C'est bien le moins qu'ils écoppent de quelques tragédies inédites » (Armand Silvestre, 1895), « [Nous] écopions des gaffes de notre personnel » (Marie-François Goron, 1899), « Ne voulant pas "écoper" d'une punition » (Le Petit Haut-Marnais, 1904), « Il n'y a pas de presse pour écoper d'un sale coup » (Paul Bourget, 1910), « Il paraît que nous allons écoper d'un roman de vous ? » (Paul Léautaud, 1933 ; par ironie), « [Il] écopa comme les autres d'un abattage en règle du général » (Jean des Vallières, 1935), « Clemenceau écopait d'une page d'invectives » (Léon Daudet, 1942), « Il avait écopé d'une retenue du jeudi » (Claude Farrère, 1945), « Un innocent qui a écopé de la prison » (Henri Queffélec, 1948), « Elle avait écopé d'un rhume de saison » (René Masson, 1951).

(le complément désigne le montant d'une amende ou la durée d'une peine, d'une punition) « [Le journal] vient d'écopper 200 balles d'amende » (La Petite Lune, 1878), « [Il] écopa, comme on dit dans l'armée, deux jours de salle de police » (Alphonse Allais, 1888), « Les témoins écopèrent quatre mois de prison » (Courteline, 1892), « [Ils] écopèrent chacun dix ans de prison » (Cendrars, 1946), « On écope dix francs [d'amende] » (André Thérive, 1948), « Vous zigouillez six personnes et vous écopez cinq ans avec sursis » (Jean Dutourd, 1950), « [Il] écoperait vingt ans » (Paul Vialar, 1953), mais « Il avait écopé de deux jours sur le terrain de manœuvres » (Courteline, 1888), « Les autres écopèrent d'un certain nombre d'années de bagne » (Marie-François Goron, 1899), « [Il] écopa de vingt-cinq francs d'amende » (Émile Guillaumin, 1904), « Ils écopent d'un certain nombre d'années de prison » (Francis Carco, 1954).

(plus rarement, le complément désigne un animé dont la présence est importune) « Elles ne courront pas le risque d'écoper un enfant » (Colette, 1904), mais « Un petit gars [...]. Je ne l'avais même pas choisi. Il m'était tombé du ciel, j'en avais écopé » (Maurice Genevoix, 1952), « Elle pouvait pas se farcir un mâle sans écoper d'un lardon dans le tiroir » (Auguste Le Breton, 1960), « J'écopais d'un vieux chien mité » (Hervé Prudon, 2002), « Il est assez fréquent d'écoper d'un gamin totalement dénué de charme » (Marie Vila Casas, 2014), « Elle avait écopé d'un mec qui se pointe en caleçon au petit-déjeuner » (Félix Lemaître, 2021). (5)

Ces exemples montrent assez, d'une part, que Goosse a tort de penser que la construction transitive directe a longtemps dominé et, d'autre part, que la répartition établie par l'Académie est artificielle (Esnault soutenait du reste la répartition inverse : « Je vois des patiras écoper un bleu, un abattage, et des filous écoper de six mois » [Le Français moderne, 1946]). Le Dictionnaire historique n'est pas davantage fondé à réserver l'emploi de écoper de au seul sens « être condamné (à une peine de prison) ». On retiendra que, dans l'acception figurée qui nous occupe et qui est attestée depuis au moins 1870, écoper se construit indifféremment avec ou sans la préposition de. Et si, de nos jours, la préférence semble bien être donnée à la construction indirecte (« Il a écopé d'une amende ou, moins courant, Il a écopé une amende », lit-on dans le Larousse en ligne), la construction directe a encore ses partisans (dont Jean-Paul Colin, qui ne connaît que écoper une amende). Comparez (et notez les hésitations) :

(écoper de quelque chose) « Il risque d'écoper de huit ans ferme » (Katherine Pancol, 1993), « [Il] écope du bagne pour avoir dérobé une miche » (Jean Dutourd, 1997), « Desailly écope d'un carton rouge » (Régine Deforges, 1998), « Écoper de quatre ans de captivité en Silésie » (Bertrand Poirot-Delpech, 2000), « Robert écopa d'une gifle magistrale » (Philippe Djian, 2005), « [Il] écope de trois mois de prison et d'une amende » (Alain Rey, 2007), « Pour écoper d'une ironie » (Yann Queffélec, 2007), « Raoul écopa d'une semonce » (Dominique Fernandez, 2008), « [Il] écope de cinq ans de prison » (Id., 2010), « Elle écopa de six mois de prison avec sursis » (Patrick Rambaud, 2012), « Attentifs à ne pas écoper d'une balle ou d'un éclat d'obus » (Monique Molière, 2020).

(écoper quelque chose) « J'écopai une belle jaunisse » (Roger Ikor, 1975), « Son client venait d'écoper le maximum » (Hervé Bazin, 1975), « Le Vieux finit par écoper un mauvais coup » (Pierre Schoendoerffer, 1981), « Mon frère écopa une raclée [...]. J'écope cinq jours supplémentaires de prison » (Dominique Fernandez, 1982), « [Ils] écopent six ans de prison » (Christine Arnothy, 1984), « Écopant dans le doigt une écharde » (France Bastia, 1986), « Le type qui écope une contravention » (Patrick Grainville, 1992), « Écoper vingt ans » (Françoise Xenakis, 1993), « Il écopa un éclat d'obus et quatre années de captivité » (Jean Fouquet, 1997), « Il écopa cinq ans ferme » (Yann Queffélec, 2010), « [Un cycliste] écope la mitraille » (Monique Molière, 2020).

Quant à la question du registre auquel appartient désormais notre verbe, force est de reconnaître, avec Goosse, qu'elle fait débat :

« Parlant d'un ancien Premier ministre malaisien persécuté par ses successeurs, Le Monde écrit et met en titre, même : "Il écope de cinq ans de prison." Le verbe écoper est ignoré de Littré. Il n'en existe pas moins, mais il signifie officiellement "vider (un bateau) à l'aide d'une écope". Son usage au sens de "subir" (un coup), "recevoir" (une blessure ou une sanction) et particulièrement "être condamné à une peine de prison" relève d'un registre sinon tout à fait argotique, du moins extrêmement familier. On voit mal ce qui légitime qu'il y soit recouru, à propos d'événements tragiques, dans Le Monde, qui, officiellement, n’est pas un journal comique, ni même satirique. Mais c’est bien conforme au mouvement général de naturalisation de ce niveau de langage, jadis réservé à des échanges au sein de groupes particuliers, les lycéens, les étudiants, les employés d'une même entreprise, les ouvriers, les soldats, les sportifs ou les délinquants » (Renaud Camus, Répertoire des délicatesses du français contemporain, 2000).

« Le verbe, au figuré, est familier » (Jean-Paul Colin, 1994), « Quelle que soit la construction choisie, écoper au figuré est considéré comme familier » (Paul Roux, Lexique des difficultés du français dans les médias, 1997), « Registre familier » (Larousse en ligne, 2014).

« Les dictionnaires persistent à décrire le verbe écoper comme "familier", même s’il n’a plus rien de "familier" depuis longtemps » (Paul Morisset, 2019).

Ajoute encore à la confusion le fait que l'emploi qualifié de « populaire » dans la neuvième édition du Dictionnaire de l'Académie ne ressortissait qu'à la « langue familière » dans la huitième : « Il aurait perdu du galon ! » s'étonne à bon droit le Québécois Maurice Rouleau.

Dans le doute, mieux vaut encore passer son chemin et recourir, selon le contexte, à recevoir, essuyer, prendre, être condamné à, être victime de, etc. Histoire de ne pas prendre le risque d'écoper (d')un carton rouge, pour atteinte au beau langage et viol de la syntaxe.
 

(1) Curieux choix, soit dit en passant, que celui de définir une acception transitive directe par un synonyme qui se construit indirectement (être frappé de quelque chose pour écoper quelque chose) et inversement (subir, endurer, recevoir quelque chose pour écoper de quelque chose).

(2) « Le gosier joue ici le rôle de l'écope », note Lorédan Larchey dans son Dictionnaire historique d'argot (1878).

(3) Et l'auteur de préciser : « Cette expression appartient au langage des marins – d'eau douce – par allusion à l'écope ou pelle en bois avec laquelle ils vident leurs canots lorsqu'ils ont embarqué un peu d'eau. »

(4) On s'étonne de lire dans le Dictionnaire historique que « ce sens ["boire"] n'a pas vécu ».

(5) Curieusement, le verbe est aussi attesté avec un complément désignant quelque chose qui n'est pas désagréable : « J’ai failli écoper de la Marseillaise à votre place » (Fernand de Girodon-Pralon, 1888), « Écopant de plusieurs semaines de convalescence et de haltes quotidiennes, fort agréables il est vrai, dans la petite salle carrelée où officiait [l’infirmière] » (Yann Apperry, 2000), « Saïd Taghmaoui écope d'une nomination aux Césars » (Christophe Carrière, 2010).


Remarque 1 : Écoper s'emploie aussi de manière absolue au sens de « essuyer quelque désagrément (coups, tirs, réprimandes, injures...), trinquer, déguster » : « Il était dit que personne n’écoperait cette nuit-là » (Alphonse Daudet, 1871), « Allons-y, et si nous écopons, tant pis ! » (Xavier de Montépin, 1880), « Ce qui m'a un peu consolé, c'est que je n'ai pas été le seul à écoper, comme on dit ici [= au collège] » (Paschal Grousset, 1883), « Tais-toi ou tu écoperas » (Louis-Nicolas Bescherelle, 1887), « [Un article] où ce pauvre Baju "écoppe" mais "écoppe" ! » (Verlaine, 1888), « Elle mériterait d'écoper sec, la sale petite grue ! » (Farrère, 1915), « C'était un chic type, ce bougre-là, parce qu'il écopait salement si je m'faisais poisser » (Henri Barbusse, 1916), « [Il] a été sept fois blessé avant d'être tué, et chaque fois qu'il revenait d'une expédition sans avoir écopé, il avait l'air de s'excuser »  (Proust, 1927), « J'avais salement écopé » (Georges-Olivier Châteaureynaud, 2013), « Rappelons-nous la sombre rage, étant gosses, d'écoper pour d'autres ! » (Poirot-Delpech, 1998).

Remarque 2 : Tout bien pesé et écopé, il me semble que l'idée commune à toutes les acceptions du verbe écoper est celle de « prendre, attraper » : prendre l'eau (pour l'évacuer ou pour la boire), prendre la nourriture (pour la manger), prendre un coup, une balle, une amende, une punition, six mois ferme, attraper une maladie... Voilà qui, en plus de plaider en faveur de la construction transitive directe, justifierait les emplois suivants : « Ce que Juliette va écoper !... » (Édouard Cadol, 1873), « Qu'est-ce qu'il va écoper ! » (Jacques Bourdenet, 1959) ; « [Le juge] va me passer promptement à la casserole ! Je vais en écoper pour au moins 20 ans !... » (Céline, 1948), « Tu vas en écoper pour vingt ans, mon salaud ! » (Patrick Rambaud, 1985).

 

Flèche

Ce qu'il conviendrait de dire


La même chose ou, moins couramment, Il écope la peine maximale.

 

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C
Analyse qui méritait d’être menée tant ce verbe 𝘦́𝘤𝘰𝘱𝘦𝘳 est surprenant. <br /> En reprenant les études de fréquence et les attestations, j'ai pu constater à quel point l'approche de Lorédan Larchey (dont la première édition du dictionnaire d'argot est même de 1883) est la plus intéressante. C'est bien de cette période que datent à la fois l'introduction de la préposition, le changement de sens et la mauvaise connotation de l'expression. À mon sens, la construction directe encore employée par la suite provient d'un refus d'incorporer la forme argotique et de la volonté de la ramener à la construction de base. Rien ne justifie sémantiquement « écoper une amende ».
Répondre
C
Sur votre réponse : le sens de base de la racine (PIE *skep-, proto-germanique *skop-) est celui de creuser, racler, enlever de la matière puis de l'eau. La notion de "prendre" est très tardive et a été reconstituée pour tenter d'expliquer le glissement de sens. Les dérivés dans les autres langues (anglais scoop, scupper, all. Schüppe) n’ont, eux, pas changé de sens [source OED]. Mais ceux qui ont écopé ne devaient pas être au courant. L'étymologie est pleine de surprises...
M
Rien ne justifie sémantiquement « écoper une amende ».<br /> Au contraire... (cf. Remarque 2).