• Prendre (sa) part

    « Dès le début du discours, il rappelle le bilan des cinq années de sarkozysme auquel il prend toute sa part » (à propos du François Fillon, photo ci-contre, candidat à la présidence de l'UMP).
    (Nicolas Chapuis, sur nouvelobs.com, le 12 novembre 2012)  
     
     
    (photo Wikipédia sous licence GFDL par Marie-Lan Nguyen)



    FlècheCe que j'en pense


    Voilà une construction qui ne laisse pas de m'intriguer.

    Si l'on dit correctement prendre part à quelque chose au sens de « participer, prendre intérêt à », il me semble – pour ma part – que la préposition de est requise pour introduire le complément dont le mot part désigne une portion, un élément.

    Ainsi l'Académie écrit-elle dans son Dictionnaire : Je veux prendre ma part de vos soucis, de vos joies (= je veux m'associer à vos soucis, à vos joies, en en assumant ma part), tout comme on prend sa part de responsabilité ou, plus familièrement, sa part du gâteau.

    La confusion entre ces deux constructions a conduit notre journaliste à substituer, à tort, le pronom relatif auquel à dont. Il faut croire que ledit dont n'a pas la dent dure : n'avait-il pas été malmené quelques lignes plus haut ? « C’est bien de cela dont il est question ». D'emblée, l'article prenait l'eau de toute(s) part(s)...


    Voir également le billet Dont.

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Le bilan des cinq années de sarkozysme dont il prend toute sa part.

     


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  • Un concours auxquels

    « Certes, ce n'est pas un concours de beauté auxquels sont invités les adhérents de l'UMP, le 18 novembre prochain » (à propos de l'élection du futur président du parti).
    (Matthieu Deprieck, dans L'Express no 3201, novembre 2012) 

    FlècheCe que j'en pense


    Voilà un bel exemple de cette paresse intellectuelle qui consiste à ne plus savoir accorder un pronom relatif avec son antécédent.

    Si la langue relâchée a – bien à tort – tendance à rendre lequel invariable, notre journaliste, quant à lui, a cru devoir donner au pronom relatif composé auquel le nombre et le genre du sujet de la proposition relative (les adhérents de l'UMP). C'est oublier que le pronom relatif est censé s'accorder avec l'antécédent qu'il représente (un concours de beauté). Oh ! qu'il est vilain cet accord, auquel on ne saurait adhérer !

    Par ailleurs, on est en droit de se demander s'il n'aurait pas été plus judicieux de rattacher la préposition à à l'antécédent mis en relief...

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    « Ce n'est pas un concours de beauté auquel sont invités les adhérents de l'UMP » ou mieux : « Ce n'est pas à un concours de beauté que sont invités les adhérents de l'UMP ».

     


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  • Il faut mieux

    « Dès lors que nous n'étions pas suffisamment au clair sur les risques écologiques des forages, il fallait mieux se limiter aux seules expérimentations » (à propos du débat sur l'exploitation des réserves de gaz de schiste).
    (Jean-François Copé, lors du Grand rendez-vous Europe 1, le 11 novembre 2012) 



    (photo Wikipédia sous licence GFDL par Marie-Lan Nguyen)

     

    FlècheCe que j'en pense


    Voilà un joli barbarisme – « un solécisme grossier », selon Dupré – qui résulte de la confusion entre deux tours corrects : Il faut (idée d'obligation, de nécessité) et Il vaut mieux (idée de préférence, d'avantage).

    Comparez : Il faut se limiter aux seules expérimentations et Il vaut mieux (ou Mieux vaut) se limiter aux seules expérimentations.

    On retiendra que l'adverbe mieux ne peut accompagner qu'un verbe susceptible d'introduire un avantage (aimer, valoir, etc.), à la différence de falloir qui exprime une obligation absolue ne souffrant ni degrés ni comparaisons. En revanche, Il faut mieux évaluer les risques écologiques ne saurait prêter le flanc à la critique, puisque mieux porte logiquement sur évaluer (et non pas sur falloir).

    Dans notre exemple, Jean-François Copé s'est manifestement emmêlé les forages entre les deux constructions impersonnelles. Un bel exemple d'usine à gaz, si je... pui(t)s me permettre.

    Voir également le billet Falloir / Valoir.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Il valait mieux se limiter aux seules expérimentations.

     


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  • Il a stupéfait ses proches

    « François Bayrou a stupéfait ses proches en s'exprimant récemment sur le projet de mariage pour tous. »
    (lu dans Le Point no 2093, octobre 2012) 

     

     
    François Bayrou (photo Wikipédia sous licence GFDL par Guermonprez)

     

    FlècheCe que j'en pense


    La règle est pourtant claire : à stupéfait (du latin facere, sens actif) le rôle d'adjectif ; à stupéfié (du latin fieri, sens passif) celui de participe passé. L'usage l'est beaucoup moins...

    Si certains spécialistes (Grevisse, Dupré) ne voient pas au nom de quel principe on refuserait à un participe passé (stupéfié) d'être utilisé comme adjectif, tous s'accordent pour cantonner stupéfait dans son emploi adjectival. Tous ? Pas exactement...

    Larousse et Robert ont depuis longtemps accueilli dans leurs colonnes le très contesté verbe stupéfaire, légitimant de fait l'emploi de stupéfait comme participe passé. Force est de reconnaître à ceux qui tiennent ledit verbe pour un affreux barbarisme qu'il se rencontre sous les meilleures plumes : « Cela me stupéfait » (Flaubert), « Une chose par-dessus tout m'a stupéfait » (Mauriac).

    L'Office québécois de la langue française justifie cet état de fait d'une pirouette : « Ce verbe [qui] ne se rencontre qu’à la troisième personne du singulier du présent de l’indicatif et aux temps composés [est] d’un emploi rare et littéraire. » La belle affaire ! Vous ne serez donc pas... surpris de me voir privilégier le verbe stupéfier dans l'exemple qui nous occupe.

    Voir également le billet Stupéfait / Stupéfié.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Il a stupéfié ses proches.

     


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  • Jusque et y compris

    « On l'étend parfois dans un espace dédié, mais il est souvent éparpillé dans toutes les pièces, jusque et y compris le salon et les chambres à coucher » (à propos du linge qui sèche).
    (Marielle Court, sur lefigaro.fr, le 6 novembre 2012) 

    (photo Wikipédia sous licence GFDL par Drw25)

     

    FlècheCe que j'en pense


    Je ne... m'étendrai pas sur cette manie qui consiste à employer dédié au sens élargi de « consacré, réservé, spécialisé, destiné, affecté » (voir à ce sujet le billet Dédier).

    Pour le reste, c'est toujours la même rengaine : on croit faire partie du beau linge en usant d'un beau parler dont on ne maîtrise pas les subtilités, et l'on se fait étendre sur place. Le ridicule sème à tout vent, jusques et y compris dans les colonnes de nos journaux les plus sérieux.

    Il se trouve que, devant une voyelle, si l'élision est d'usage, il fut un temps où jusque prenait fréquemment un s final. De nos jours, la graphie jusques est une forme archaïque qui ne se rencontre plus guère que dans la locution figée jusques et y compris (pour indiquer avec insistance le point limite d'un ensemble), ainsi qu'en poésie, pour des considérations phonétiques.

    Jusqu'à quand ? (registre courant) ou Jusques à quand ? (registre littéraire et quelque peu affecté).

    Vous lirez ce dossier, jusques et y compris les annexes (marque un renchérissement par rapport à y compris).

     

    Voir également le billet Jusque.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    On l'étend parfois dans un espace aménagé (réservé), mais il est souvent éparpillé dans toutes les pièces, jusques et y compris le salon et les chambres à coucher.

     


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