« Bonjour Monsieur le Ministre. Je suis professeur des écoles (...) Ces enfants en réelle difficulté méritent d’avoir un enseignant expérimenté qui pourra leur apporter toute l’attention et la différentiation nécessaires. »

(message « posté » sur le site de France Inter, à l'occasion de l'intervention du ministre de l'Éducation nationale, Vincent Peillon, photo ci-contre, le 3 septembre 2013)
 

(photo Wikipédia par Rectorat45)

Ce que j'en pense

 
Loin de moi l'intention d'ajouter ma voix au concert des mauvaises langues qui ne manqueront pas de rappeler que, en l'espèce, c'est de professeurs maîtrisant la langue française que les enfants ont besoin. Le procès est facile et l'erreur, assurément humaine. Car enfin, pour peu que l'on soit féru de mathématiques, on aura tôt fait de confondre différenciation, nom d'usage courant qui désigne l'action de (se) différencier, de (se) distinguer par des caractéristiques non semblables, et l'homophone différentiation, terme de mathématiques qui désigne une opération par laquelle on obtient la différentielle d'une fonction. Comparez : La différenciation des espèces animales, la différenciation pédagogique, la différenciation sociale et Le théorème de différentiation de Lebesgue.

À la décharge de notre enseignante, reconnaissons que Littré ne goûtait guère cette... différenciation orthographique « qui ne s'appuie sur aucune bonne raison » (*). L'Académie elle-même renonça un temps à distinguer les deux lignées – issues du latin differentia (« caractère qui distingue une chose d'une autre ») –, avant de faire marche arrière dans la dernière édition de son Dictionnaire.

Gageons cependant que notre ministre aura à cœur de préserver ladite distinction entre différencier et sa variante didactique différentier, s'il ne veut pas voir fleurir des calculs différenciels (au lieu de différentiels) en cours de mathématiques.

(*) « Il ne faut pas confondre différencier, mettre une différence, et différentier, prendre la différentielle (terme de mathématique). Ces deux mots sont les mêmes ; mais l'orthographe les différencie : différence qui d'ailleurs ne s'appuie sur aucune bonne raison. »

Remarque : Différencier et différentier se conjuguent comme crier et doublent le i à la première et à la deuxième personne du pluriel de l'indicatif imparfait et du subjonctif présent : (que) nous différenciions, (que) vous différentiiez.

Voir également le billet Différend / Différent / Différant.  

Ce qu'il conviendrait de dire

Apporter toute l’attention et (toute) la différenciation nécessaires.