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Censé / Sensé
Censé, participe passé de l'ancien verbe censer (« penser, estimer, juger, considérer »), signifie de nos jours « supposé, considéré comme devant faire quelque chose » et est suivi d'un infinitif.
Il est censé s'en occuper aujourd'hui (= il est supposé s'en occuper aujourd'hui).
Son homonyme sensé (avec un s car dérivé de sens) désigne celui qui a du bon sens, qui est réfléchi, raisonnable.
Un homme sensé n'aurait pas agi ainsi.
Je trouve sa décision peu sensée.
Si la phrase supporte de remplacer censé/sensé par insensé, c'est qu'il s'agit de sensé avec un s. Appliquons cette astuce pleine de bon sens aux exemples cités plus haut :
Il est insensé s'en occuper aujourd'hui (ne fonctionne pas) mais Un homme insensé n'aurait pas agi ainsi (fonctionne).
Remarque : Il ne faudrait pas croire pour autant que les adjectifs censé et supposé sont synonymes. Comparez :L'auteur supposé de l'attentat (et non L'auteur censé de l'attentat).
Des exercices supposés compris (= des exercices censés être compris).
L'adjectif supposé signifie « qui est donné pour authentique, quoique faux » (un nom supposé, un testament supposé) et, plus couramment, « présumé », « admis comme hypothèse, comme probable ou par convention » (quand censé exprime une croyance ferme).
Quant à la locution être supposé (voire, au Canada, être supposé de, calque de l'anglais to be supposed to) suivie d'un infinitif, d'aucuns considèrent qu'on doit lui préférer être censé. Force est de constater que tous les spécialistes de la langue ne sont pas de cet avis : « On peut dire : Il est supposé avoir compris » (Hanse), « la langue française se prête fort bien à cette construction "anglaise" » (Dupré). « Rien ne s'oppose en principe à cette alliance de supposé et d'un infinitif actif » écrit encore René Georgin, qui ne rechignerait pas à « construir[e] de même présumé : Il est présumé avoir commis le crime, encore qu'aucun exemple de ces emplois ne figure dans le Littré ». Oserai-je faire remarquer à cet éminent grammairien qu'il n'a pas cherché au bon endroit ? Car si le tour est effectivement absent à l'entrée supposer du Littré, il se trouve bel et bien aux entrées baguette, cataracte, cela, chantre, chœur, devant, diablerie, divinatoire, fresaie, générateur, hélose, homme, ou, plastique, venir : « Celui qui chante ou est supposé chanter », « Le bon sens est ce qui est supposé appartenir à la plupart des hommes », « Il se dit des choses qui sont supposées se mouvoir », etc. Au demeurant, ladite construction ne date d'hier : elle est attestée notamment chez Bossuet (« l'Oraison dominicale est supposée être l'oraison d'obligation de tous les fidèles »), chez Buffon (« le pied cube est supposé peser soixante-douze livres »), dans le Dictionnaire étymologique de Gilles Ménage (« Or comme tout espace est supposé faire partie d'une grandeur », 1750) et dans l'Encyclopédie de Diderot (« la corde est supposée faire de très petites variations », 1777).
Un homme sensé est censé connaître la loi !
(Livre de Pierre-Olivier Sur, Editions JC Lattès)
Tags : sensé, censé, supposé, être supposé de
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Commentaires
2philippeLundi 22 Février 2016 à 15:56Merci pour votre précision, Marc!
Ma part de doute était très faible, je dois l'avouer, mais j'aime savoir jusqu'où on peut employer certaines expressions. Dans ce cas précis, mon (léger) doute venait de la définition même du mot "censé": "être considéré comme, devant être, devant faire quelque chose". Le côté actif du sujet semblait contrarié par le côté passif de l'expression. Mais dans votre exemple, on pourrait remplacer "être censé" par l'anglicisme "être supposé", (puisque l'expression vient de là!) ce qui valide pleinement l'utilisation de cette expression.
Cordialement
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Lundi 22 Février 2016 à 18:31
Être censé (suivi de l'infinitif), calque de l'anglais to be supposed to ? Pas si sûr...
Tout ce que je sais, c'est que le tour est attesté de longue date en français : "il est censé faire ce que le fils eust fait" (1607), "[ils] sont censés faire tout ce dont ils sont priez" (1623), etc.
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3PhilippeLundi 22 Février 2016 à 21:05Il est en effet fort possible que ce soit l'Anglais qui ait calqué le Français; "être censé" plus infinitif reste une expression courante. Chaque fois que j'ai utilisé la version "être supposé", on m'a reproché la lourdeur de la tournure (même si le contexte pouvait l'expliquer). On m'a même dit que c'était un anglicisme! Pensez-vous que cette formulation soit tombée en désuétude?
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Mardi 23 Février 2016 à 14:33
Ma réponse se trouve dans l'article ci-dessus (dernier paragraphe de la Remarque, que je viens de compléter).
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4Michel JEANMardi 23 Février 2016 à 11:32
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Bonjour!
Je me pose une question sur l'utilisation de l'expression "être censé" suivie de l'infinitif... Peut-on dire "elle n'était pas censée éprouver une telle douleur", ou "elle n'était pas censée avoir de telles contractions"? (dans le sens : "elle ne devrait pas, après avoir pris tel médicament") Ce qui me gêne, c'est la notion de sens qui est absente dans l'expression anglaise ("supposed to") Merci d'avance!
Philippe
Je ne suis pas certain de bien comprendre ce qui vous gêne. Mais, pour répondre à votre question, oui, cela se dit : "[les] mouvements intérieurs qu'il est censé éprouver" (Dictionnaire des théâtres de Paris, 1756).