• Aucun(s) frais

    Aucun(s) frais

    « Certains pays, comme le Danemark, n'appliquent aucun frais de scolarité dans l'enseignement supérieur. »

    (Marie-Estelle Pech, sur lefigaro.fr, le 23 octobre 2013) 


    FlècheCe que j'en pense

     
    Loin de moi l'intention de jeter un froid, mais je me dois de rappeler ici que frais, à moins de qualifier le fond de l'air scandinave, est un substantif masculin toujours au pluriel quand il est employé au sens de « dépenses » : Les frais généraux, les frais de transport. Un spectacle donné à grands frais, à moindres frais, aux frais de la princesse. Tous frais payés. Arrêter les frais. Rien d'étonnant, dès lors, à ce que Girodet préconise de « ne pas dire : un grand frais, un petit frais, mais une grande dépense, une petite dépense ».

    Employé avec des mots qui n'ont pas de singulier ou qui changent de sens au pluriel, l'adjectif aucun, bien que signifiant littéralement « pas un autre », n'a d'autre choix que de se mettre au diapason en prenant par exception la marque du pluriel : Aucuns frais. Aucuns travaux. Aucunes funérailles. Aucunes vacances.

    Aucun doute, il y a bien quelque chose de pourri au royaume de Danemark : notre journaliste vient d'en faire les frais !

    Remarque 1 : On notera toutefois − autres temps, autres conventions − qu'aucun (comme nul) s'est employé couramment au pluriel jusqu'au XVIIIe siècle : « Il attend son destin sans faire aucunes plaintes » (La Fontaine), « Aucuns tourments n'ont pu empêcher les martyrs de confesser leur religion » (Pascal), « Il ne garda aucunes mesures » (Bossuet), « Aucuns monstres par moi domptés jusqu'aujourd'hui » (Racine), « Je ne me mêlai plus d'aucunes affaires » (Montesquieu), « Il n'y avait encore aucuns Chrétiens sur la terre » (Rousseau), « Je n'ose faire aucuns projets » (Voltaire), « Jamais sans doute aucunes larmes / N'obscurciront pour eux le ciel » (Lamartine). En 1836, Louis-Nicolas Bescherelle écrivait encore dans sa Grammaire nationale qu'« aucun précède le substantif qu'il détermine et en revêt tous les accidents de nombre et de genre ».

    Remarque 2 : Voir également le billet Frais.

     

    Flèche

    Ce qu'il conviendrait de dire


    Certains pays n'appliquent aucuns frais de scolarité dans l'enseignement supérieur.

     

    « De si tôtMajuscule ou minuscule ? »

  • Commentaires

    1
    Jean -François
    Mercredi 30 Octobre 2013 à 16:30

    Au risque de passer pour un illettré,n'hésitez pas à faire les bonnes liaisons dans la phrase  "sans aucuns autres frais" Merci pour la défense de notre langue.

     

    2
    Mercredi 30 Octobre 2013 à 16:46

    Merci de cette judicieuse remarque. Reconnaissons, toutefois, que d'aucuns préfèrent, à l'oral, éviter cette liaison peu naturelle - quoique correcte - en optant pour une autre tournure.

    3
    Titivillus
    Mardi 2 Décembre 2014 à 19:33

    Une publicité pleine page de Canal+ (vue dans Nice-Matin du 26 novembre 2014) : «Putain, on a encore craqué. On a ouvert l'accès à Canal Play pour tous nos abonnés sans aucun frais [...]. » Mais une fois, un commerçant a fait imprimer dans ses conditions de vente une phrase comme « Aucun frais supplémentaire ne sera facturé » parce que, a-t-il répliqué à la personne qui lui expliquait la règle grammaticale, la phrase au pluriel le choquait. À quoi ça tient !

    4
    Mardi 2 Décembre 2014 à 20:45

    Nous voilà frais ! wink2

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